Biographie de Georges Feydeau
Georges Feydeau est né à Paris en 1862. Il est le fils du romancier Ernest Feydeau et de Léocadie Bogaslawa Zelewska. Plusieurs sources mentionnent qu’il serait le fils de Napoléon III ou du Duc de Morny. Il grandit au sein d’un milieu littéraire et bohème.
« Comment je suis devenu vaudevilliste ? C’est bien simple. Par paresse. Cela vous étonne ? Vous ignorez donc que la paresse est la mère miraculeuse, féconde du travail.
Et je dis miraculeuse, parce que le père est totalement inconnu.
J’étais tout enfant, six ans, sept ans. Je ne sais plus. Un soir on m’emmena au théâtre. Que jouait-on ? Je l’ai oublié. Mais je revins enthousiasmé. J’étais touché. Le mal venait d’entrer en moi. » (voir la suite dans l’article Le vaudeville et Feydeau)
En 1873, il écrit Eglantine d’Amboise, pièce historique qui se déroule à l’époque de Louis XIII, puis en 1878 un drame : L’Amour doit se taire.
Georges Feydeau renonce assez tôt à des études poussées pour se consacrer au théâtre. Il tente tout d’abord une carrière d’acteur et fonde au sein du Lycée Saint-Louis la compagnie le Cercle des Castagnettes, destiné à donner des concerts et des représentations théâtrales.
Le 2 avril 1880, lors d’une séance du Cercle, une élève du Conservatoire dit La Petite Révoltée, le premier monologue de Feydeau, qui sera récité dans quelques salons. Sa première pièce, Par la fenêtre, est jouée en 1882, alors qu’il n’a que 20 ans. Feydeau écrit plusieurs monologues, dits par Galipaux, Coquelin cadet et Saint-Germain (Le Mouchoir, Un coup de tête, Un monsieur qui n’aime pas les monologues, Trop vieux, J’ai mal aux dents…). En 1883, Amour et piano, pièce en un acte est représentée par le Cercle de l’Obole à l’Athénée-Comique le 28 janvier, est très bien reçue par la critique.
Gibier de potence, comédie-bouffe en un acte, est créée au Cercle des Arts intimes le 1er juin, où Feydeau joue lui-même le rôle titre. Feydeau continue à écrire des monologues dit par Coquelin cadet (Le Potache et Patte en l’air) et par Judic (Aux antipodes, Le Petit Ménage).
En novembre 1883, Feydeau est incorporé au régiment d’infanterie. L’année suivante, il fait représenter de nouveaux monologues par Coquelin cadet (Les Célèbres) et par Galipaux (Le Volontaire). Feydeau devient secrétaire général du théâtre de la Renaissance, dirigé par Fernand Samuel.
En 1884, il écrit L’Homme de paille.
Entre mars 1885 et début mars 1886, Feydeau tient la rubrique « Courrier des théâtres » au XIXe siècle, journal dirigé par son beau-père, Henry Fouquier. Il continue à écrire des monologues, dits par Coquelin cadet et Saint-Germain: Les Réformes, Le Colis et Le Billet de mille.
Fiancés en herbe, une comédie enfantine en un acte, est créée le 29 mars 1886 à la salle Kriegelstein. Deux nouveaux monologues sont interprétés par Coquelin cadet : L’Homme intègre et L’Homme économe.
Feydeau fréquente les milieux mondains, les salons littéraires et les cercles privés grâce à la notoriété de son père et la recommandation de son beau-père. Il rencontre des acteurs, des musiciens, des écrivains, des critiques littéraires, des journalistes, et aussi des peintres, d’autant plus qu’il prend des cours dans l’atelier du portraitiste Carolus-Duran.
Feydeau abandonne ses fonctions au théâtre de la Renaissance et peu après rencontre enfin un grand succès tant auprès de la critique que du public avec Tailleur pour dames, comédie en trois actes créée au Théâtre de la Renaissance le 17 décembre 1886.
Il créé en 1887 un nouveau monologue, Les Enfants, pour Coquelin aîné. Les œuvres suivantes (La Lycéenne en 1887, Un Bain de ménage , Chat en poche, Les Fiancés de Loches en 1888, L’Affaire Édouard en 1889, écrite avec Maurice Desvallières) ne rencontrent pas le même succès. En 1889, Feydeau épouse Marianne Carolus-Duran, la fille du peintre, avec laquelle il aura quatre enfants.. En février 1890, Feydeau est admis à la Société des auteurs et compositeurs dramatiques avec Henri Meilhac et Georges Ohnet pour parrains.
Feydeau rencontre de nouveaux échecs en 1890 avec deux pièces écrites en collaboration avec Maurice Desvallières : C’est une femme du monde, comédie en un acte, et Le Mariage de Barillon, vaudeville en trois actes, créées au théâtre de la Renaissance. Il continue à écrire des monologues : Tout à Brown-Séquard, monologue dit par Coquelin cadet en 1890 et Madame Sganarelle (1891)
La consécration vient en 1892 avec les pièces Monsieur chasse !, Champignol malgré lui et Le Système Ribadier : il devient alors le « roi du vaudeville ». Nouveau succès avec Un fil à la patte, comédie en trois actes, créée le 9 janvier 1894au Théâtre du Palais-Royal : 129 représentations.
Mais en 1894, il connait aussi quelques échecs avec Notre futur et Le Ruban, comédie écrite avec Desvallières, avant de renouer avec le succès en fin d’année avec L’Hôtel du Libre Échange, écrite avec Maurice Desvallières et créée le 5 décembre 1894 au théâtre des Nouveautés (371 représentations).
En 1896, il crée le Dindon (succès : 275 représentations), puis les Pavés de l’ours. 1897 voit le montage de deux nouvelles pièces : Séance de nuit et Dormez, je le veux !
Feydeau poursuit en parallèle une carrière d’acteur avec Robert de Flers et Mme Gaston de Caillavet, en jouant notamment des pièces de Maurice Donnay ou Anatole France. En 1898, Feydeau écrit le livret de la Bulle d’amour sur une musique de Francis Thomé. Coquelin cadet crée un nouveau monologue : Le Juré.
1899 voit le triomphe de La Dame de chez Maxim, pièce créée au théâtre des Nouveautés, qui sera jouée pendant deux ans (524 représentations) : cette pièce sera même une des principales attractions touristiques du Paris de l’Exposition Internationale. Armande Cassive, qui tient le rôle de la môme Crevette, devient l’une des interprètes favorites de l’auteur. Grâce à ce succès, l’auteur se consacre pendant deux ans à la peinture. En 1899, il écrit un monologue pour Coquelin cadet, Un monsieur qui est condamne à mort.
L’année 1901 est difficile : Feydeau est contraint de vendre à l’Hôtel Drouot 136 tableaux de sa collection (Boudin, Corot, Cézanne, Monet, Renoir, Sisley…). En 1902, Feydeau co- écrit avec Jules Méry sur une musique d’Alfred Kaiser le Billet de Joséphine, un opéra-comique à grand spectacle qui est un échec (16 représentations). Il renoue avec le succès à la fin de la même année avec La Duchesse des Folies-Bergère, créée au théâtre des Nouveautés. Il est contraint en 1902 à une nouvelle vente de tableaux. En 1904, La main passe ! rencontre un vif engouement au théâtre des Nouveautés (211 représentations).
La critique accueille en 1905 avec intérêt la pièce féérique et très atypique, L’Age d’or, écrite avec Maurice Desvallières sur une musique de Louis Varney.
L’année suivante, la critique et le public accueille favorablement Le Bourgeon au théâtre du Vaudeville. La Puce à l’oreille triomphe en 1907, mais les représentations sont interrompues avec la mort de l’acteur Torin, qui interprète la rôle de Camille. Nouveaux succès en 1908 avec Occupe-toi d’Amélie et de Feu la mère de Madame.
En 1909, le Circuit, pièce écrite en collaboration avec Francis de Croisset est un échec. Marqué par sa séparation avec sa femme et son installation à l’Hôtel Terminus, les pièces suivantes s’éloignent du vaudeville et sont plus proches de comédies de mœurs, dans lesquelles il tourne en ridicule la médiocrité des existences bourgeoises : On purge bébé ( 85 représentations en 1910), Mais n’te promène donc pas toute nue ! (la pièce créée le 25 novembre 1911 tient l’affiche jusqu’au début de mars 1912).
En 1911, Léonie est en avance ou Le Mal joli, reçoit un bon accueil de la critique. En 1912 Feydeau est élu vice-président de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (jusqu’en 1914) et en juillet 1913, il est nommé officier de la Légion d’honneur.
Je ne trompe pas mon mari, pièce écrite en collaboration avec René Peter et créée en février 1914 au théâtre de l’Athénée rencontre un bon accueil de la critique et du public (200 représentations). En 1916, Hortense a dit : « Je m’en fous ! », est également un succès avec 89 représentations. Cette même année, Feydeau écrit son dernier monologue La Complainte du pauv’ propriétaire.
En 1919, il souffre des premiers symptômes de la syphilis (troubles psychiques) et est installé par ses enfants dans une maison de santé à Rueil-Malmaison. Il meurt le 5 juin 1921 et est enterré le 8 juin au cimetière Montmartre. C’est Robert de Flers, président de la Société des auteurs, qui fait son éloge funèbre.
Hommage à Feydeau
Par Sacha Guitry, dans Portraits et anecdotes.
« Je pense qu’aucun homme, jamais, ne fut plus favorisé que lui par le Destin. Il avait, dans son jeu, tous les atouts : la beauté, la distinction, le charme, le goût, le talent, la fortune et l’esprit. Puis, le Destin voulant parachever son œuvre, il eut ce pouvoir prodigieux de faire rire… D’autres, me direz-vous, l’avaient eu avant lui et d’autres l’ont encore, ce pouvoir, (…) mais lui, Georges Feydeau, ce qu’il avait en outre, et sans partage, c’était le pouvoir de faire rire infailliblement, mathématiquement, à tel instant choisi par lui et pendant un nombre défini de secondes. Ses pièces étaient conçues, construites, écrites, mises en scène et jouées à une cadence particulière et que, vingt ans après sa mort, on est tenu de respecter.
Ses vaudevilles, puisque c’est ainsi qu’on appelle ses oeuvres, portent sa marque indélébile. D’autres vaudevilles ressemblent aux siens, mais les siens ne ressemblent pas aux vaudevilles des autres.
Faites sauter le boîtier d’une montre et penchez-vous sur ses organes : roues dentelées, petits ressorts et propulseurs – mystère charmant, prodige ! C’est une pièce de Feydeau qu’on observe de la coulisse. Remettez le boîtier et retournez la montre : c’est une pièce de Feydeau vue de la salle – les heures passent, naturelles, rapides, exquises…
Il était un ami fidèle, attentif et discret. C’était un solitaire – et cet homme qui faisait éclater de rire ses contemporains, a traversé la vie mélancoliquement. Son visage était si fin, si beau, si français que c’est celui que M. Larousse avait choisi pour illustrer le mot moustache. »
Jean Cocteau
En 1941, Jean Cocteau réalise les décors et les costumes de la Main passe (article paru dans La Gerbe, le 6 février 1941. Source : BNF/ Gallica
« Pourquoi Marcel Ferrand et Jean Marchat m’ont demandé les décors et les costumes de « La Main passe » ?
Parce que Feydeau est un poète lyrique dans son genre et qu’ils voulaient n’avoir recours qu’à un poète. Pourquoi ai-je accepté ? Par respect pour Feydeau-poète et pour une noble troupe qui progresse de jour en jour. Rien de plus naïf que de croire que la poésie au théâtre se limite à Musset. Musset, c’est le théâtre poétique. La poésie de son théâtre ne vient pas de ce que les personnages disent des choses poétiques qui horripilaient Baudelaire, mais d’un certain mécanisme mystérieux. Quand les Français cesseront-ils de confondre la poésie avec ce qui est poétique, le rêve et la rêverie ?
Lorsque j’étais très jeune et que je rentrais chez moi, il m’arrivait de m’arrêter à la terrasse de Maxim’s où m’attirait un homme étrange. C’était Feydeau. Considérable, le col du pardessus relevé, le melon basculé sur une toute petite figure, constellé d’opales, les yeux mi-clos jusqu’à n’être que des fentes, la moustache fine, il soulevait d’une main molle jusqu’à sa bouche sinueuse un cigare énorme. Je le conduisais souvent jusqu’au kiosque du marchand de journaux de la gare Saint-Lazare, avec lequel il conversait jusqu’à l’aube. «
Vous pouvez explorer l’univers de Feydeau à travers les autres articles :
– Le Théâtre de Georges Feydeau
– Les ressorts comiques du langage chez Feydeau
– La politique dans les pièces de Feydeau
– Les progrès techniques dans les pièces de Feydeau
– Le vaudeville et Feydeau (à travers deux articles de Feydeau).