Monsieur Badin de Georges Courteline

Couverture de l'édition chez Albin Michel de 1897
Couverture de l’édition chez Albin Michel de 1897

Pièce en un acte représentée pour la première fois à Paris, au Grand-Guignol, le 13 avril 1897.
Adaptation d’un chapitre du roman Messieurs les ronds-de-cuir.
T
exte connu également sous le titre L’employé qui ne veut pas aller à son bureau (dans les recueils Potiron et Jean de la Butte)
Distribution : 3 hommes
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L’argument

Un fonctionnaire régulièrement absent est accueilli par son chef qui lui demande des comptes. Pour sa défense, il lui expose les affres que lui font subir la crainte perpétuelle de sa révocation, et finit par en tirer argument pour réclamer une augmentation.

Monsieur Badin en audio et en vidéo

Enregistrement audio de 1954 avec Fernandel, Georges Chamarat, Manuel Gary. Lien vers le site de Gallica.
Enregistrement pour la télévision française du 31 décembre 1958, mise en scène de François Chatel avec Jean Poiret et Michel Serrault. Lien vers le site de l’INA

Enregistrement audio réalisé par le site  courteline.org

Un extrait

Monsieur Badin.
Monsieur, je vais vous expliquer. J’ai été retenu chez moi par des affaires de famille. J’ai perdu mon beau-frère…
Le directeur.
Encore !
Monsieur Badin.
Monsieur…
Le directeur.
Ah çà ! monsieur Badin, est-ce que vous vous fichez de moi ?
Monsieur Badin.
Oh !…
Le directeur.
À cette heure, vous avez perdu votre beau-frère, comme déjà, il y a trois semaines, vous aviez perdu votre tante, comme vous aviez perdu votre oncle le mois dernier, votre père à la Trinité, votre mère à Pâques ! Sans préjudice, naturellement, de tous les cousins, cousines, et autres parents éloignés que vous n’avez cessé de mettre en terre à raison d’au moins un la semaine. Quel massacre ! non, mais quel massacre ! A-t-on idée d’une boucherie pareille !… Et je ne parle ici, notez bien, ni de la petite sœur qui se marie deux fois l’an, ni de la grande qui accouche tous les trois mois. Eh bien ! monsieur, en voilà assez. Que vous vous moquiez du monde, soit ! mais il y a des limites à tout, et si vous supposez que l’Administration vous donne deux mille quatre cents francs pour que vous passiez votre vie à marier les uns, à enterrer les autres, ou à tenir sur les fonts baptismaux, vous vous mettez le doigt dans l’œil !
Monsieur Badin.
Monsieur le directeur…
Le directeur.
Taisez-vous ! Vous parlerez quand j’aurai fini ! Vous êtes ici trois employés attachés à l’expédition : vous, M Soupe et M Fairbatu. M Soupe en est aujourd’hui à sa trente-septième année de service et il n’y a plus rien à attendre de lui que les preuves de sa vaine bonne volonté. Quant à M Fairbatu, c’est bien simple : il place des huiles en province !… Alors quoi ? Car voilà pourtant où nous en sommes, il est inouï de penser que sur trois expéditionnaires, l’un soit gâteux, le second voyageur de commerce et le troisième à l’enterrement depuis le jour de l’An jusqu’à la Saint Sylvestre !… Et naïvement vous vous êtes fait à l’idée que les choses pouvaient continuer de ce train ?… Non, monsieur Badin ; cent fois, non ! J’en suis las, moi, des enterrements, et des mariages, et des baptêmes !… Désormais, c’est de deux choses l’une : la présence ou la démission ! Choisissez ! Si c’est la démission, je l’accepte. Je l’accepte à cet instant même. Est-ce clair ? Si c’est le contraire, vous me ferez le plaisir d’être ici chaque jour sur le coup de dix heures, et ceci à partir de demain. Est-ce clair ? J’ajoute que le jour où la fatalité, cette fatalité odieuse qui vous poursuit, semble se faire un jeu de vous persécuter, viendra vous frapper de nouveau dans vos affections de famille, je vous balancerai, moi ! Est-ce clair ?
Monsieur Badin.
Ah ! vous me faites bien de la peine, monsieur le directeur ! À la façon dont vous me parlez, je vois bien que vous n’êtes pas content.

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