Spectacle à la une

Spectacles à la une, actuellement à l’affiche en France ou dans les pays francophones et recommandés par Libre Théâtre

L'île des Esclaves de Marivaux mise en scène de Mickaël Soleirol

Vu au Guichet Montparnasse, le 30 mars 2023

Si l’intrigue de cette petite pièce de Marivaux se situe dans la Grèce antique, son propos est à la fois intemporel et universel. Un couple de nobles et un autre de valets font naufrage sur une île régie par les lois d’une étrange république où les rôles de chacun sont inversés : les maîtres sont destinés à devenir les esclaves de leurs anciens serviteurs. Pour recouvrer la liberté, les oppresseurs devront d’abord confesser leurs abus et leurs péchés d’orgueil. Cédant d’abord à l’envie de se venger, les victimes de ces tyrans déchus finiront par choisir le pardon, après avoir reçu de leurs maîtres reconnaissants des gages de fraternisation à venir. Tous reprendront bientôt la mer, et tout rentrera finalement dans l’ordre, sans que l’on sache exactement si cette épreuve aura fait progresser la liberté, l’égalité ou même seulement la fraternité.

 

Écrite un demi-siècle avant la Révolution, cette pièce de Marivaux ne semble guère prêcher la révolte. Elle se moque à la fois des maîtres et des valets, et mise sur la miséricorde pour régler la lutte des classes. Il s’agit donc plutôt d’une comédie de mœurs assez légère, délicieusement interprétée par cinq comédiens pleins d’allant et de talent. La mise en scène est soignée, et les lumières très réussies. Le tout dans un petit théâtre permettant une grande proximité avec le public. Un spectacle tout public, à ne pas manquer.

Critique de Jean-Pierre Martinez

Théâtre Le Guichet Montparnasse, 15 rue du Maine, 75014 Paris
Du 2 mars au 22 juin 2023 à 19h

Mise en scène : Mickaël Soleirol

Avec
Violette Blanckaert
Damien Dufour
Noëlle Malacchina
Mickaël Soleirol
Xavier Vilsek ou Jean-Philippe Azema
Avec la voix de Xavier Fagnon

Musiques : Pierre-Emmanuel Desfray

Costumes : Nastasia Tourneur

Lien vers le site du Guichet Montparnasse

Lien vers la chronique de la pièce sur Libre Théâtre

Le dernier jour de Pierre par la Compagnie Deraïdenz

Sortie de résidence le 29 mars 2023 au Théâtre du Chêne Noir

Photos : Serge Gutwirth - Janvier 2023

La Compagnie Deraïdenz recevait hier soir le public avignonnais au Théâtre du Chêne Noir pour échanger avec lui sur le processus de création en cours de son prochain spectacle : Le Dernier Jour de Pierre. Un moment rare de partage. Si un magicien ne révèle jamais ses trucs, il est aussi exceptionnel qu’une compagnie de marionnettes prenne ainsi le risque de mettre à jour la mécanique généralement cachée derrière les rideaux, et de dévoiler ses secrets voire ses doutes.

 

Imaginé par Baptiste Zsilina, assisté par de nombreux autres membres de cette compagnie avignonnaise, ce spectacle de marionnettes, sans parole, s’annonce comme une expérience esthétique, sensorielle et émotionnelle unique, dans la lignée des précédentes créations de la Compagnie (Les souffrances de JobInKarnè ou Byba Youv) qui, en convoquant des univers très singuliers et des sujets très forts, ont durablement marqué tous les spectateurs.

Pour l’occasion, la Compagnie Deraïdenz avait dressé sur la scène du Chêne Noir un échafaudage de plusieurs mètres de hauteur, abritant deux décors en papier mâché rappelant les paysages provençaux en hiver, décors parmi d’autres dans lesquels des marionnettes à fils seront destinées à évoluer lors du spectacle à venir.

Par une démonstration de la manipulation de ces marionnettes et de la mécanique des changements de décors, les jeunes membres de cette compagnie, à la fois passionnés et espiègles, ont permis au public non spécialiste d’appréhender la technicité et la minutie de cet art exigeant. La scénographie, l’expressivité des visages et des mouvements, la beauté et la fluidité des costumes, l’accompagnement musical au service d’un récit étonnant, constituent à l’évidence la promesse d’un spectacle exceptionnel.

L’aspect serein de ces décors et de ces marionnettes, cependant, en rappelant l’univers des santons de Provence, contrastait avec l’univers sombre et torturé constituant la marque de fabrique de la Compagnie Deraïdenz, qui prend toujours un malin plaisir à nous faire peur pour mieux nous faire réfléchir, en nous donnant à voir la « matière noire » qui nous entoure… On s’attendait donc à ce que ce conte sans histoire tourne au cauchemar. Et ce fut le cas avec le surgissement saisissant des « brèches noires » dans ce paysage exhalant déjà une infinie tristesse.


Afin de ménager le suspense, la Compagnie, cependant, a pris soin de ne pas dévoiler tous les détails de cette création en cours. Elle nous donne rendez-vous en décembre 2023 pour cette première qui n’en doutons pas fera date dans l’histoire de cette jeune compagnie pleine de talents et dotée d’une extrême exigence tant dans le propos que dans les moyens techniques et artistiques utilisés. Un rendez-vous à ne pas manquer.

Critique de Ruth et Jean-Pierre Martinez

Distribution Dramaturgie, Conception et Mise en Scène : Baptiste Zsilina en collaboration avec Léa Guillec

Construction Marionnette et Décor : Baptiste Zsilina avec Églantine Remblier, Marion Pirault
Costumes : Sarah Rieu avec le soutien de l’Atelier Métissé 

Composition Musique : Baptiste Zsilina
Musiciens : Etienne Beauny, Théodora Carla, Sylvain Mazens, Christophe Pottier, Baptiste Zsilina.
Sound design et mixage : Arthur Bohl
Cadre de Scène et Machinerie : Nicolas Pautrat assisté par Coline Agard et Thierry Hett.
Marionnettistes : Marion Pirault, Coline Agard, Léa Guillec, Christophe Pottier et Églantine Remblier.
Régie Générale et Création Lumière : Loris Lallouette
Photos de Plateau : Serge Gutwirth
Diffusion : Anna Massonnet
Date de création : Décembre 2023
Durée : 50 minutes
Type de narration : Conte contemplatif, sans texte, ponctué de Brèches Noires horrifiques.
Technique principale : Marionnette à fils

Public : à partir de 12 ans

Lien vers le site de la Compagnie Deraïdenz
Lien vers le site du Théâtre du Chêne Noir

Le Voyage dans la lune de Jacques Offenbach, mise en scène d'Olivier Fredj

Triomphe de l’hilarant Voyage dans la lune d’Offenbach, mis en scène par Olivier Fredj à l’Opéra Grand Avignon

 

Spectacle vu à Avignon le 24 mars 2023
Crédit photo : Cédric & Mickaël Studio Delestrade – Avignon

Le Voyage dans la lune de Jacques Offenbach est une féérie lyrique en 23 tableaux aux décors fantastiques, se succédant à un rythme effréné, ce qui constitue l’une des nombreuses difficultés de cet opéra hors norme, et qui explique qu’il soit si rarement représenté. L’action de cette opérette rétro-futuriste se déroule en effet à la fois sur la Terre et sur la Lune, en des lieux aussi différents et grandioses qu’un observatoire astronomique, une forge dantesque, un palais de verre ou un volcan. Un défi pour tout metteur en scène, donc, que relève avec brio Olivier Fredj.

Le livret de cette œuvre lyrique est fortement inspiré des romans de Jules Verne (De la Terre à la Lune et Voyage au centre de la Terre, notamment). En utilisant le procédé du théâtre dans le théâtre pour faire de la représentation un tournage, le metteur en scène souligne délibérément le côté factice de l’ensemble, tout en exploitant habilement le potentiel comique de cette histoire fantastique mais aussi symbolique. Olivier Fredj joue avec intelligence des images vidéos, tout en convoquant la machinerie traditionnelle de l’opéra pour proposer des scènes d’une grande beauté. Il parvient à provoquer l’hilarité du public par la gestuelle et la voix de ces personnages extravagants, ainsi que par les costumes dont ils sont affublés. Olivier Fredj réussit également à transmettre avec finesse le message de l’œuvre originale, prônant la tolérance vis-à-vis de l’Autre et critiquant les préjugés de la société bourgeoise, en ce qui concerne la condition féminine notamment. Jamais le choix de mélanger les genres n’a paru aussi pertinent et cohérent, le tout sous le portrait en transparence d’un Offenbach goguenard, plus actuel que jamais.

 

La musique entraînante de Jacques Offenbach, servie avec allant par l’orchestre national Avignon-Provence sous la direction d’Yves Senn, réjouit par son inventivité. Elle provoque elle aussi le rire, et parfois l’émotion.  L’ensemble des interprètes, solistes et membres du Chœur de l’Opéra Grand Avignon, jouent la comédie aussi bien qu’ils chantent. Le duo dans les airs d’Héloïse Mas, incarnant avec panache le rôle travesti de Caprice, et de Sheva Toval, une Fantasia tour à tour enjouée ou touchante, restera longtemps dans nos mémoires. 

 

On n’oubliera pas les danseurs acrobates qui contribuent également au succès de cette féerie.

 

Un spectacle tout public à ne pas manquer. Encore à Avignon, ce dimanche à 14h30.

Critique de Ruth Martinez

Distribution

Direction musicale :  Yves Senn

Mise en scène : Olivier Fredj


Décors et costumes : Malika Chauveau
Lumières : Nathalie Perrier
Chorégraphe : Anouk Viale
Assistant à la mise en scène : Florimond Plantier
Assistant aux lumières : Mathieu Cabanes
Études musicales : Mathieu Pordoy

 

 

Caprice : Héloïse Mas
Fantasia : Sheva Tehoval
V’lan : Matthieu Lécroart
Microscope : Eric Vignau
Cosmos : Thibaut Desplantes
Cactus : Christophe Poncet de Solages
Quipass’parla :  Enguerrand de Hys
Popotte : Marie Lenormand
Flamma/Adja : Jennifer Michel

 

Chœur de l’Opéra Grand Avignon
Orchestre national Avignon-Provence

 

Crédit photo : Mac Ginot
Crédit photo : Mac Ginot

L'ensemble Châkam au Festival andalou

Spectacle vu le 18 mars 2023 au Chien qui fume, à Avignon

Programmées dans le cadre du Festival Andalou, les trois musiciennes de la formation Chakâm ont enchanté le public avignonnais venu en nombre pour les écouter au théâtre Le Chien qui fume. Créée en 2014 par Sogol Mirzaei pour diffuser et populariser la tradition musicale persane, cet ensemble réunit aujourd’hui trois virtuoses qui, en conjuguant leur talent, la diversité de leurs origines et les spécificités de leurs instruments, ont su créer un univers musical très original. Sogol Mirzaei, d’origine iranienne, déploie toutes les techniques du jeu du târ, faisant ressortir la poignante expressivité de ce très vieil instrument persan. Christine Zayed, d’origine palestinienne, mêle avec brio la sonorité cristalline du qânun et sa voix chaude et profonde. À côté de ces deux instruments traditionnels, Marie-Suzanne de Loye et sa viole de gambe apportent une couleur différente, alternant basse continue rappelant la musique baroque, sonorités orientales et rythmes jazziques.

La richesse mélodique et la variété rythmique des compositions et des improvisations de ce trio féminin très attachant nous entraînent dans un voyage hors du temps, tout en constituant au présent un engagement pour la liberté, notamment celle des femmes, d’exprimer sa passion par la voix et par la musique. Une formation à suivre. 

Critique de Ruth Martinez

Une épopée d'Al Andalous au Rouge Gorge à Avignon

Spectacle vu au Rouge Gorge le 17 mars 2023

Le Festival Andalou nous offre un concert en partage dans le cadre exceptionnel du Rouge Gorge à Avignon

Il faut d’abord parler du lieu. Car venir au Rouge Gorge, surtout pour la première fois, est en soi un événement extraordinaire. Installé dans l’ancienne imprimerie Aubanel, au pied du monumental Palais des Papes, et adossée au Rocher des Doms qui affleure encore à l’intérieur, le Rouge Gorge, avec sa structure métallique et sa vaste nef centrale entourée d’une coursive, le tout surplombé d’une verrière, a des allures de cathédrale industrielle ou de paquebot transatlantique. 

C’est d’ailleurs à un voyage musical et culturel entre l’Occident et l’Orient que nous invitaient l’Orchestre Tarab et la chorale Les Chandalous, sous la direction du maître Fouad Didi. Un voyage de l’Andalousie à Damas, nous invitant à découvrir des musiques savantes ou populaires, associées à des textes poétiques et philosophiques.

Les femmes, avignonnaises et pour la plupart d’origine maghrébine, largement majoritaires dans la Chorale Les Chandalous, étaient donc aussi en nombre sur la scène pour donner de la voix aux côtés des musiciens et chanteurs de l’Orchestre Tarab, nous offrant ainsi le magnifique tableau de la France que l’on aime, faite de métissage et de diversité culturelle, de liberté d’être soi-même et d’envie de partage avec l’autre. 

Il est éminemment symbolique que ce mariage entre l’Orient et l’Occident ait été célébré dans l’ancienne imprimerie de l’un des créateurs, avec Frédéric Mistral, du Félibrige : Théodore Aubanel. Preuve s’il en faut que la revendication d’une identité et d’une spécificité, lorsqu’elle est culturelle et humaniste, n’est pas incompatible bien au contraire avec une ouverture vers toutes les autres cultures.

L’Andalousie est ce lieu mythique où, pendant plusieurs siècles, les trois religions monothéistes ont su cohabiter en harmonie pour offrir au monde une culture d’une grande richesse et un art d’un extrême raffinement. On se prend à rêver que le monde entier s’inspire de ce modèle, en faisant des diversités culturelles une inépuisable richesse naturelle.

Souhaitons bonne chance à Harold David et Mickaël Perras, qui animent désormais ce lieu magique du Rouge Gorge. N’en doutons pas, tout au long de l’année, ils nous offriront encore bien d’autres spectacles d’un très haut niveau artistique, faisant une place à l’utopie, générateurs de bonne humeur et de convivialité.

Critique de Jean-Pierre Martinez

Orchestre Tarab avec :
Fouad Didi (violon, oud, chants),
Youssef Kasbadji (derbouka),
Farid Zebroune (banjo, mandole),
Zak (clavier-piano), 

Ensemble vocal Chandalous d’Avignon (chants)

Lien vers le site web du Rouge Gorge

La terre et la poudre par le Teatro Strappato

Spectacle vu le 8 mars 2023 au Théâtre Episcène (Avignon)

Dans le cadre du Festival Primaveral, consacré aux cultures ibéro-américaines, Libre Théâtre a assisté au Théâtre Épiscène d’Avignon à la première représentation en français de la nouvelle création du Teatro Strappato : « Tierra y pólvora ». Nous avions découvert cette compagnie, dont le travail est notamment basé sur la création et la manipulation du masque en cuir, lors de l’édition de 2019 du Festival Off d’Avignon, où elle présentait Betún, un spectacle muet d’une extraordinaire puissance sur les enfants des rues en Amérique Latine.

Teatro Strappato nous revient cette fois avec un spectacle de conte et de masques sur le thème de l’exil. « Terre et poudre », écrit et mis en scène par Vene Vieitez et magistralement interprété par Cecilia Scrittore, est le récit poignant de la tragique errance d’une femme chassée de son pays par la guerre, qui la jette sur les routes de l’exode avec son enfant après la mort de son mari. On ne peut évidemment pas résumer ce spectacle à cette simple trame dramatique. « Terre et poudre », en effet, joue avec brio sur les codes de l’énonciation et du théâtre dans le théâtre, une narratrice introduisant les divers personnages de cette tragédie, tous étant incarnés par une seule comédienne d’exception, Cecilia Scrittore, à l’aide de divers masques et d’une gestuelle d’une grande puissance évocatrice. 

Ce spectacle, cependant, n’est pas un récit de plus sur le drame de l’émigration. Cette exilée, qui pourrait être afghane, syrienne ou ukrainienne, symbolise à elle seule toutes les victimes de la guerre, avec le sinistre cortège de violences qu’elle engendre à sa suite, et ce récit très poétique, n’excluant pas tout à fait l’humour malgré la gravité du sujet, prend donc une dimension universelle. 

Georges Brassens se moquait à juste titre des « imbéciles heureux qui sont nés quelque part », et qui par leur nationalisme chauvin attisent les conflits entre les hommes et cultivent la xénophobie, en invitant notamment les exilés à rentrer chez eux. Mais comment rentrer chez-soi quand ce chez-soi a disparu à jamais ? Comment rentrer à la maison quand la maison n’est plus qu’un tas de cendres. Trop souvent, hélas, la violence des hommes se répand sur la Terre comme une traînée de poudre. Ne laissant derrière elle que cette poussière à laquelle nous sommes tous destinés à retourner. En attendant peut-être qu’une averse longtemps espérée fasse refleurir l’espoir d’un monde nouveau, plus juste et plus apaisé.

Un spectacle à ne pas manquer, vivement recommandé par Libre Théâtre.

Critique de Jean-Pierre Martinez

Production : Teatro Strappato
Interprétation : Cecilia Scrittore
Écriture et mise en scène : Vene Vieitez
Création originale des masques : Cecilia Scrittore et Vene Vieitez
Création sonore : Vene Vieitez

Cecilia Scrittore et Vene Vieitez avec l'équipe du Festival Primaveral

Lune jaune ou la ballade de Leila et de Lee de David Greig

Photo V. Tallon

Spectacle vu au Théâtre des Halles, le 2 février 2023
Dans le cadre de Fest’Hiver 2023

Avec ce road movie tragi-comique, David Greig s’inscrit dans la déjà longue tradition du théâtre et du cinéma social d’outre-Manche, représentée entre autres par Dennis Kelly ou Ken Loach. La pièce nous conte (c’est le cas de le dire puisque le récit est à la troisième personne) l’histoire de deux adolescents par définition un peu paumés, en quête de leur identité, voire même de leur rapport à la réalité, poussés suite à un crime à entreprendre un voyage initiatique qui les conduira de Glasgow aux Highlands, à la poursuite d’un père aussi fantomatique que fantasmatique.

Sans entrer dans les détails de cette narration complexe, on saluera l’habileté de la mise en scène pour donner vie sur un plateau à cette errance existentielle, et la performance des comédiens totalement investis dans ces personnages à la fois hyper réalistes pour certains dans leur sensibilité adolescente à fleur de peau, mais aussi symboliques en ce qu’ils incarnent en même temps les archétypes du récit mythique de la construction de soi par la construction de son rapport au monde et à la société.

Critique de Jean-Pierre Martinez

Texte : David Greig
Traduction : Dominique Hollier
Mise en scène : Olivier Barrère

Avec Marion Bajot, Cédric Marchal, Thibaut Pasquier, Titouan Huitric

Collaboration artistique : Aurélie Pitrat
Musique : Nico Morcillo
Scénographie, lumière et images : Erick Priano
Costumes Coline Galeazzi

Compagnie Il va sans dire

 

Les Rêveurs de la lune à l’Opéra Grand Avignon

Un opéra pour enfants d’Howard Moody 

Crédit photo : Klara Beck

L’opéra est un lieu à juste titre sacré… mais parfois un peu trop sacralisé. Que des enfants s’en emparent le temps d’une matinée est une petite révolution à la fois joyeuse et porteuse d’avenir. Surtout quand ces enfants ne sont pas relégués seulement dans la salle en spectateurs passifs pour recevoir une leçon de plus, mais quand ils sont invités à participer eux-mêmes au spectacle, soit sur la scène en tant qu’acteurs et chanteurs, soit dans la salle pour former un chœur faisant écho à l’histoire qui se déroule sur le plateau. Une histoire qui d’ailleurs raconte la révolte de la jeunesse contre un monde courant à sa perte pour avoir interdit à ses enfants de poursuivre leurs rêves. Par cette habile mise en abyme, cet opéra participatif incite donc les jeunes à ne pas considérer l’art en général comme une idole à vénérer, mais comme une activité libératrice à laquelle ils sont encouragés à participer, dès maintenant en tant qu’amateurs et pourquoi pas demain en tant qu’artistes professionnels.

Ce spectacle, conçu par Sandra Pocceschi et Giacomo Strada, réunit aux côtés de quatre solistes d’envergure internationale et de l’Orchestre national Avignon-Provence dirigé par Federico Santi, les élèves de la Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon et les élèves de la classe CHAM du collège Joseph d’Arbaud de Vaison-la-Romaine.
Critique de Jean-Pierre Martinez

Crédit photo : Klara Beck

Opéra pour enfants d’Howard Moody inspiré par La conférence des oiseaux (1171) du poète persan
Farid al-Din Attar
Livret de Anna Moody
Traduction française Benoît de Leersnyde

Production de l’Opéra national du Rhin

Direction musicale : Federico Santi
Mise en scène, décors, costumes : Sandra Pocceschi Giacomo Strada
Lumières et vidéo : Giacomo Gorini repris par Thierry Kocher
Études musicales : Ayaka Niwano

Rossignol : Aurélie Jarjaye
Cigogne : Alexia Macbeth
Paon : Pierre-Antoine Chaumien
Huppe fasciée : Marc Scoffoni
Rêveurs et Moineaux : 
Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon  sous la direction de Florence Goyon-Pogemberg
Élèves de la Classe à Horaires Aménagés Musique de 6ème du collège Joseph d’Arbaud Vaison-la-Romaine – Thibaut Plantevin (professeur)

Orchestre national Avignon-Provence

Lien vers le site de l’Opéra Grand Avignon

Scène finale – Crédit photo : Libre Théâtre

Rinaldo de Haendel mis en scène par Claire Dancoisne

Photo : Laurent Guizard

Rinaldo à l’Opéra Grand Avignon : un spectacle merveilleux tant d’un point de vue musical qu’esthétique

L’opéra Rinaldo de Haendel est un des sommets de la musique baroque*. Alors qu’il est maître de chapelle à Hanovre, Haendel se rend à Londres en 1710 et rencontre un des directeurs du Queen’s Theatre, Aaron Hill, qui lui propose de créer un opéra, s’inspirant de La Jérusalem délivrée du Tasse. Haendel écrit en quinze jours la musique de Rinaldo, sur un livret de Giacomo Rossi. Comme de nombreuses œuvres de la période baroque, Rinaldo est un « pasticcio », une œuvre lyrique qui réutilise des compositions antérieures de Haendel mais aussi des morceaux célèbres d’autres compositeurs. De fait, cet « opera seria » propose une succession d’airs à succès d’une extraordinaire inventivité et d’une beauté mélodique bouleversante.

Photo : Laurent Guizard

Cette œuvre a été beaucoup remaniée par Haendel lui-même. La version que proposent le chef Bertrand Cuiller et la metteuse en scène Claire Dancoisne est plus resserrée, gommant l’aspect religieux de l’œuvre originale pour davantage mettre en valeur l’univers symbolique et fantastique de l’opéra. Le résultat est époustouflant : chacun des tableaux est d’une grande créativité, tout en rappelant l’imaginaire de Jérôme Bosch. Un travail scénique qui, en outre, fait appel à toutes les techniques théâtrales, en un hommage spectaculaire aux machineries londoniennes de l’époque de Haendel, notamment quand apparaissent la magicienne Armida sur un dragon ailé, ou Argante sur un poisson à la mâchoire impressionnante, semblant prête à dévorer l’orchestre. On notera aussi les emprunts au théâtre sicilien de marionnettes (« Opera dei Pupi ») pour les scènes de guerre, ou encore au petit théâtre d’objets et de marionnettes (marionnettes manipulées par les interprètes eux-mêmes). L’humour est aussi très présent avec de nombreux clins d’œil à la pop culture et des scènes hilarantes notamment quand le héros Rinaldo enfourche son fidèle destrier, un cheval de fer, à roulettes, démesuré et désarticulé.

Cette splendide mise en scène n’éclipse pas, bien au contraire, l’interprétation musicale. Depuis son clavecin, le chef d’orchestre Bertrand Cuiller dirige avec fougue et précision le superbe ensemble Le Caravansérail, qui tantôt accompagne les chanteurs, et tantôt dialogue avec eux. La qualité de l’interprétation de l’orchestre tient une part importante dans le succès de ce spectacle total salué par de longues ovations. On n’oubliera pas, bien sûr, les cinq chanteurs lyriques dont les prestations vocales et scéniques ont conquis le public.
Un spectacle à ne pas manquer

Critique de Ruth Martinez


* Elisa Barbessi, professeure de Clavecin et d’Histoire de la musique au Conservatoire du Grand Avignon et chercheuse au Collegium Musicæ (Sorbonne Université) a donné le 19 novembre une conférence passionnante autour de Rinaldo, « summa de l’opéra baroque ». Elle était accompagnée de Célia Vakanas, professeure de flûte à bec au Conservatoire du Grand Avignon.

Direction musicale : Bertrand Cuiller
Ensemble Le Caravansérail
Mise en scène et scénographie : Claire Dancoisne assistée de Marie Liagre
Lumières : Hervé Gary
Costumes : Elisabeth de Sauverzac
Régie générale : Camille Rouzeval
Régie plateau : Nicolas Marchand
Régie lumière : Melaine Danion
 
Rinaldo : Paul Figuier
Goffredo : Blandine de Sansal
Almirena : Maïlys de Villoutreys
Armida : Aurore Bucher
Argante : Timothée Varon
Deux comédiennes : Rita Tchenko, Marion Zaboitzeff
 
Production la co[opéra]tive
Les 2 Scènes, scène nationale de Besançon, Le Théâtre Impérial – Opéra de Compiègne, Le Bateau Feu, scène nationale Dunkerque, Le Théâtre de Cornouaille, scène nationale de Quimper, Opéra de Rennes
Coproduction : Angers Nantes Opéra, L’Entracte, scène conventionnée de Sablé-sur-Sarthe, Théâtre-Sénart, Scène nationale
En partenariat avec le Théâtre de Licorne
 
 

Dimanche 20 novembre 2022 à 14h30
Mardi 22 novembre 2022 à 20h00

 

Spectacle vu au Théâtre du Chêne Noir le 19 novembre 2022

Je ne suis pas de moi d’après Roland Dubillard

Photo : Giovanni Cittadini Cesi

Roland Dubillard a tenu toute sa vie un journal de bord. De ces « Carnets en marge », Maria Machado et Charlotte Escamez ont tiré un dialogue entre le jeune homme qui initia ce journal et l’homme mûr voire le vieillard qui l’acheva sur la fin de sa vie. Il en résulte un texte savoureux fait de réflexions sur la vie en général et sur la création artistique en particulier. Sans oublier un dantesque récit érotico-macabre à mourir de rire. Car ce spectacle, au-delà de sa dimension philosophique, ne manque pas d’humour. Sommes-nous le fils de l’enfant que nous fûmes, qui nous engendra, et qui en quelque sorte avec le temps nous laisse orphelin ? Ou bien, à la fin de notre vie, devenons-nous le père de cet enfant disparu dont nous avions la responsabilité ? Avec « Je ne suis pas de moi », le célèbre dramaturge, dans une schizophrénie jubilatoire, semble renier cette paternité existentielle dans une quête impossible de liberté.

Cet étonnant spectacle est porté par deux immenses comédiens, Denis Lavant et Samuel Mercer, incarnant les deux protagonistes de cette confrontation dialectique et existentielle. Par le verbe et le geste, ces deux interprètes d’exception expriment à la perfection l’incroyable vitalité artistique qui anima pendant toute sa vie Roland Dubillard. Pour finir, on se permettra de rendre un hommage tout particulier à Denis Lavant, véritable trésor national de la scène française. Le voir sur les planches est toujours, quelle que soit la pièce, un événement en soi.
Critique de Jean-Pierre Martinez


Photo : Giovanni Cittadini Cesi

D’après les Carnets en marge de Roland Dubillard
Adaptation et mise en scène Maria Machado et Charlotte Escamez
Avec Denis Lavant et Samuel Mercer

Production: La Compagnie Tangente
Coproduction: Marie-Cécile Renauld Prod.
Création lumière : Jean Ridereau
Création sonore : Guillaume Tiger
Vidéo : Maya Mercer
Costumes : Agnès B.
Coordinatrice à la production : Danièle Ridereau
Chargée de diffusion : Hélène Icart – Prima Donna
Assistante à la mise en scène : Eugénie Divry
Régie générale : Christian Lapaillote

Théâtre du Chêne Noir – Samedi 19 novembre à 20h
Dimanche 20 novembre à 16h

Tarifs
Général : 30€
Réduit : 25€
Pass Saison : 21€
Etudiants, demandeurs d’emploi : 10€
Pass Culture / E-Pass
Lien pour réserver

Puis au Théâtre du Lucernaire, 53 rue Notre-Dame-des-Champs, 75006 Paris
du 30 novembre au 31 décembre 2022 à 19h, du mardi au samedi et dimanche à 15h30
Lien pour réserver

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