Bérénice de Jean Racine

Tragédie en cinq actes et en vers, représentée pour la première fois le 21 novembre 1670 à l’Hôtel de Bourgogne.
Distribution : 5 hommes et 2 femmes
Texte intégral à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre.

L’argument

Titus, empereur de Rome, aime passionnément Bérénice, reine de Palestine mais il décide de la quitter par devoir…

« Ce n’est point une nécessité qu’il y ait du sang et des morts dans une tragédie ; il suffit que l’action en soit grande, que les acteurs en soient héroïques, que les passions y soient excitées, et que tout s’y ressente de cette tristesse majestueuse qui fait tout le plaisir de la tragédie. » Préface de Bérénice

Bérénice à travers Gallica

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8446859d
Illustrateur Serangeli ; Sculpteur Massard. 1802. Source : BnF/ Gallica

Acte II Scène IV

Bérénice
Hé quoi ? vous me jurez une éternelle ardeur,
Et vous me la jurez avec cette froideur ?
Pourquoi même du ciel attester la puissance ?
Faut-il par des serments vaincre ma défiance ?
Mon cœur ne prétend point, Seigneur, vous démentir,
Et je vous en croirai sur un simple soupir.


http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8427272z/f102.item
Estampe. Source : BnF/Gallica

 

Acte V. Scène 5

Titus
Vous ne sortirez point, je n’y puis consentir.
Quoi? ce départ n’est donc qu’un cruel stratagème ?
Vous cherchez à mourir ? et de tout ce que j’aime
Il ne restera plus qu’un triste souvenir ?
Qu’on cherche Antiochus, qu’on le fasse venir.


http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8427272z/f62.item
Par Moreau le jeune. Source : BnF/ Gallica

 

Acte V. Scène 5

Bérénice
Vous m’aimez, vous me le soutenez,
Et cependant je pars, et vous me l’ordonnez!
Quoi ? dans mon désespoir trouvez-vous tant de charmes ?
Craignez-vous que mes yeux versent trop peu de larmes ?
Que me sert de ce cœur l’inutile retour ?
Ah, cruel! par pitié, montrez-moi moins d’amour;
Ne me rappelez point une trop chère idée,
Et laissez-moi du moins partir persuadée
Que déjà de votre âme exilée en secret,
J’abandonne un ingrat qui me perd sans regret.


http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8427272z/f88.item
Illustration Dessenne et Girardet. Source : BnF/ Gallica

 

Acte V. Scène 5

Titus
Oui, Madame, il est vrai, je pleure, je soupire,
Je frémis. Mais enfin, quand j’acceptai l’empire,
Rome me fit jurer de maintenir ses droits :
Je dois les maintenir. Déjà plus d’une fois ,
Rome a de mes pareils exercé la constance.
Ah ! si vous remontiez jusques à sa naissance,
Vous les verriez toujours à ses ordres soumis :
L’un, jaloux de sa foi, va chez les ennemis
Chercher, avec la mort, la peine toute prête ;
D’un fils victorieux l’autre proscrit la tête ;
L’autre, avec des yeux secs et presque indifférents,
Voit mourir ses deux fils, par son ordre expirants.
Malheureux ! mais toujours la patrie et la gloire
Ont parmi les Romains remporté la victoire.
Je sais qu’en vous quittant le malheureux Titus
Passe l’austérité de toutes leurs vertus,
Qu’elle n’approche point de cet effort insigne,
Mais, Madame, après tout, me croyez-vous indigne
De laisser un exemple à la postérité,
Qui sans de grands efforts ne puisse être imité ?


Acte V. Scène dernière.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8446859d
Source : BnF/Gallica

Bérénice
Arrêtez, arrêtez ! Princes trop généreux,
En quelle extrémité me jetez-vous tous deux !
Soit que je vous regarde, ou que je l’envisage,
Partout du désespoir je rencontre l’image,
Je ne vois que des pleurs, et je n’entends parler
Que de trouble, d’horreurs, de sang prêt à couler.


http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8427272z/f74.item
Planches d’après Le Barbier. Source : BnF/ Gallica

 

Acte V. Scène dernière.

Bérénice à Antiochus.
Prince, après cet adieu, vous jugez bien vous-même
Que je ne consens pas de quitter ce que j’aime
Pour aller loin de Rome écouter d’autres vœux.
Vivez, et faites-vous un effort généreux.
Sur Titus et sur moi réglez votre conduite:
Je l’aime, je le fuis; Titus m’aime, il me quitte.
Portez loin de mes yeux vos soupirs et vos fers.
Adieu. Servons tous trois d’exemple à l’univers
De l’amour la plus tendre et la plus malheureuse
Dont il puisse garder l’histoire douloureuse.
Tout est prêt. On m’attend. Ne suivez point mes pas.


Bérénice par la Comédie Française

Enregistrement en public de Bérénice de Racine avec les comédiens de la troupe de la Comédie-Française le mardi 31 octobre 2017 à 20h en public au Studio 104 de la Maison de la Radio


Les mises en scène de Bérénice à travers le site de l’INA

Mise en scène d’Antoine Vitez, 1980

http://fresques.ina.fr/en-scenes/fiche-media/Scenes00263/berenice-de-racine-mis-en-scene-par-antoine-vitez.html
Source : INA

Lorsqu’il met en scène Bérénice en 1980, Antoine Vitez semble se désintéresser de Titus, joué par le jeune Pierre Romans, au profit d’Antiochus, dont il assume lui-même le rôle face à la Bérénice de Madeleine Marion. La pièce est jouée en costumes du XVIIIe siècle comme pour souligner l’universalité de ce qui s’y joue. Pour Vitez, cette tragédie est celle des amours interdites d’une femme pour un homme dont tout la sépare, et de son impossibilité d’en aimer un autre dont tout la rapproche : Bérénice et Antiochus présentent d’ailleurs tout au long du spectacle un rapport d’étrange camaraderie amoureuse, tandis que Titus est un adolescent veule qui fuit. Ces personnages, qui se confondent avec le politique, ne songent jamais à y renoncer et leur douleur est d’autant plus déchirante qu’elle est, dès le début, lucide.
Entrecoupée d’extraits du spectacles, tirés de la scène 3 de l’acte III et de la scène 5 de l’acte IV, une interview du metteur en scène Antoine Vitez analyse le jeu amoureux décrit par la pièce et l’incapacité des trois personnages principaux à se rejoindre.
Lien vers le reportage sur le site de l’INA

Mise en scène de Klaus-Michael Grüber à la Comédie-Française en 1984

http://fresques.ina.fr/en-scenes/fiche-media/Scenes00264/berenice-de-racine-mis-en-scene-par-klaus-michael-gruber-a-la-comedie-francaise.html
Source : INA

Premier metteur en scène allemand invité à la Comédie-Française, Klaus-Michael Grüber impose pour la saison 1984-1985 l’une des mises en scène les plus mémorables de la tragédie de Racine. Dans un décor minéral et nu, il oppose à un Titus sculptural et impérial (Richard Fontana) une Bérénice orientale à la lourde perruque (Ludmila Mickaël), superposant aux deux personnages les figures plus anciennes d’Antoine et de Cléopâtre. Très statiques, les comédiens ne s’approchent jamais les uns des autres, comme pour figurer leur incapacité à se rejoindre, et donnent à entendre une diction chuchotée qui produit une impression d’épuisement.

. Extrait du spectacle, tiré de la scène 4 de l’acte II, puis interview de Jean-Pierre Vincent, administrateur de la Comédie-Française, qui appuie le choix d’une mise en scène statique en rappelant la raréfaction des effets opérée par Racine en son temps et défend le metteur en scène allemand Klaus Michael Grüber face aux réflexes nationalistes de certains critiques.
Lien vers le reportage sur le site de l’INA

. Les comédiens interprètent dans l’escalier de la Comédie Française des extraits de »Bérénice ». Historique du rôle de Bérénice à l’aide de photos et d’interviews d’actrices ayant tenu ce rôle : Germaine ROUER et Geneviève CASILE. Les comédiens évoquent ensuite Klaus Michael GRUBER, le metteur en scène et sa façon de travailler).
Lien vers l’émission Plaisir du Théâtre sur le site de l’INA

Mise en scène de Lambert Wilson au Théâtre des Bouffes du Nord en 2007

http://fresques.ina.fr/en-scenes/fiche-media/Scenes00287/berenice-de-racine-mis-en-scene-par-lambert-wilson-au-theatre-des-bouffes-du-nord.html
Source : INA

La mise en scène de Bérénice que Lambert Wilson présente en 2007 au Théâtre des Bouffes du Nord à Paris est une seconde tentative : il avait déjà proposé une Bérénice en 2001 au Festival d’Avignon, puis au Théâtre National de Chaillot, avec Kristin Scott-Thomas et Didier Sandre dans les rôles de Bérénice et de Titus, mais la transposition qu’il avait alors opérée, situant l’action dans la Rome de Mussolini, n’avait guère convaincu. Pourtant, irrésistiblement porté vers une pièce qu’il considère comme « la pièce de Racine », contenant à ses yeux « tout le théâtre ou presque », Lambert Wilson y revient six ans plus tard, construisant une mise en scène très différente, beaucoup plus dépouillée et plus intime : s’appuyant sur les costumes et les décors sobres, à la romaine, de Chloé Obolensky, il parie avant tout sur le texte de Racine, cultivant la clarté de l’alexandrin et le respect de la prosodie. Formant avec Carole Bouquet le couple central de la tragédie, auquel les deux comédiens prêtent une distinction aristocratique, il confie à Fabrice Michel le rôle d’Antiochus et à son père Georges Wilson, âgé de quatre-vingt-six ans, celui du conseiller Paulin.
Présentation du spectacle en voix off sur des images de la préparatifs de la dernière répétition. Lambert Wilson souligne le caractère exigeant de la pièce, qui nécessite à la fois un engagement émotionnel et une attention plus intellectuelle à la langue. Extrait de la scène 6 de l’acte V en répétition. Carole Bouquet insiste sur l’exceptionnelle qualité de la langue et du théâtre de Racine.
Lien vers le reportage sur le site de l’INA

Voir aussi le reportage réalisé lors de la mise en scène de Wilson avec Kristin Scott Thomas et Didier Sandre au Palais des rois de Majorque. Lien vers le reportage sur le site de l’INA

Dramatique pour la télévision, réalisée par Raymond Rouleau, avec Laurent Terzieff
Lien vers un extrait sur le site de l’INA (intégralité en version premium).


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