5 actes

Pièce en cinq actes

Les Femmes savantes de Molière

Pièce de théâtre en cinq actes et en alexandrins, créée au théâtre du Palais-Royal le 11 mars 1672.
Distribution : 8 hommes, 5 femmes.
Texte à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argument

Trissotin, un homme pédant et ridicule, subjugue une mère (Philaminte), sa belle-sœur (Bélise) et une de ses deux filles (Armande) par son prétendu savoir. Pendant longtemps, Clitandre a courtisé Armande qui lui préférait « les beaux feux de la philosophie ». Clitandre est alors devenu amoureux de Henriette, sa soeur cadette, et tous deux veulent se marier. Mais Philaminte veut qu’Henriette épouse Trissotin, pour asseoir son alliance avec la science et la philosophie. Elle est soutenue par Bélise et Armande, jalouse. Le mari de Philaminte, Chrysale, ne veut pas s’opposer fermement aux volontés de son épouse…

Exploration dans Gallica

La mise en ligne du texte intégral des Femmes savantes par Libre Théâtre fournit le prétexte à une exploration de Gallica, la bibliothèque numérique de la BnF, en images et en sons. 

L’édition la plus ancienne de cette comédie de Molière date de 1672, année de sa création au Théâtre du Palais-Royal.

Cette oeuvre a donné lieu à de nombreuses éditions illustrées. Au XIXème siècle, Bertall, qui a notamment travaillé avec Balzac pour l’édition de la Comédie Humaine,  illustre Les Femmes Savantes dans  le Petit Journal pour tous :

  • Bélise
  • Non, non, je ne veux rien entendre davantage
  • Martine
  • Allons, sortez.
  • Chrysale
  • Allez encore un coup, c'est une moquerie
  • Excusez moi Monsieur, je n'entends pas le grec
  • Ah, le joli début !
  • Le savoir dans un fat devient impertinent
  • Trissotin et Vadius
  • Le Notaire
  • Mettez vous donc d'accord

[Collection Jaquet]. Dessinateurs et humoristes. Bertall : [défets d’illustrations de périodiques]. Source : Bibliothèque nationale de France, département Estampes et photographie, PET FOL-TF-734. 

En explorant les ressources de Gallica, on s’étonnera que les illustrateurs aient mis en avant les personnages masculins de cette pièce.

Truffier et Moreno dans Les Femmes savantes. Toulouse-Lautrec, 1893 Source : Bibliothèque de l'Institut National d'Histoire de l'Art, collections Jacques Doucet
Truffier et Moreno dans Les Femmes savantes. Toulouse-Lautrec, 1893
Source : Bibliothèque de l’Institut National d’Histoire de l’Art, collections Jacques Doucet
Georges Grand dans "Les femmes savantes", de Molière / dessin de Yves Marevéry
Georges Grand dans « Les femmes savantes », de Molière / dessin de Yves Marevéry. Source : Bibliothèque nationale de France, département Arts du Spectacle.

Grâce au Département Arts du Spectacle de la Bibliothèque nationale de France, Gallica propose de nombreux reportages photographiques de spectacles (photographe : Daniel Cande), qui illustrent la diversité des mises en scène proposées dans les trente dernières années.

Les femmes savantes / mise en scène de Françoise Seigner. - Théâtre de Boulogne-Billancourt, 24-09-1986. Photographe : Daniel Cande
Les femmes savantes / mise en scène de Françoise Seigner. – Théâtre de Boulogne-Billancourt, 24-09-1986. Photographe : Daniel Cande
Les femmes savantes / mise en scène de Jean-Luc Jeener. Paris Théâtre 14, 18-04-1995. Photographe : Daniel Cande
Les femmes savantes / mise en scène de Jean-Luc Jeener. Paris Théâtre 14, 18-04-1995. Photographe : Daniel Cande
Les femmes savantes / mise en scène de Catherine Hiegel. - Paris Théâtre de la Porte Saint-Martin, 27-04-1987 . Photographe : Daniel Cande
Les femmes savantes / mise en scène de Catherine Hiegel. – Paris Théâtre de la Porte Saint-Martin, 27-04-1987 . Photographe : Daniel Cande

Gallica propose également des enregistrements de la pièce à écouter en intégralité sur le site. On signalera un enregistrement de la collection Encyclopédie sonore de 1960 avec Michel Bouquet dans le rôle de Trissotin.
Lien vers Gallica pour écouter la pièce en intégralité
Distribution complète : Maria MAUBAN (Armande) – Catherine SELLERS (Henriette) – Jean DESCHAMPS (Clitandre) – Marguerite PIERRY (Bélise) – Yves FURET (Ariste) – Fernand LEDOUX (Chrysale) – Rosy VARTE (Martine) – Françoise ROSAY (Philaminte) – Michel BOUQUET (Trissotin) – Gaston ANDRE (L’Epine) – Pierre VANECK (Vadius) – Jacques MULLER (Julien) – Roger PECH (Le Notaire) ; Pièces pour clavecin de Louis COUPERIN, par Marcelle CHARBONNIER. Réalisation : Georges HACQUARD.

Sur Culture Box

trissotin2Trissotin ou les Femmes Savantes, mise en scène de Macha Makeïeff Reportage sur Culture Box et pièce intégrale en replay sur Culture box jusqu’au 18 juillet 2016.

Dossiers pédagogiques

Pièce Démontée : dossier pédagogique « Théâtre » et « Arts du cirque » à l’occasion du spectacle Trissotin ou les Femmes Savantes, mise en scène de Macha Makeïeff, Janvier 2016 . Lien vers le site

A l’affiche

Par la compagnie Mandarine, lien vers le spectacle

Mise en scène Catherine Hiegel au Théâtre de la Porte Saint-Martin, lien vers le spectacle

Les Deux Amis ou le Négociant de Lyon

Drame en 5 actes et en prose de Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais représentée pour la première fois à la Comédie-Française le 13 janvier 1770.
Distribution : 5 hommes, 1 femme
Texte intégral de la pièce à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

Lesdeuxamis_1Le contexte

A partir de 1760, Beaumarchais poursuit en parallèle une carrière d’homme d’affaires et d’homme de lettres. Ses deux premières pièces, sont des drames : Eugénie ou la Vertu du désespoir en 1767 et Les Deux Amis ou le Négociant de Lyon en 1770. Elles sont toutes deux des échecs.  La troisième pièce de Beaumarchais, Le Barbier de Séville, rencontre un vif succès en 1775, après toutefois des débuts difficiles qui obligent Beaumarchais à réécrire le texte : la comédie passe de 5 à 4 actes.

L’argument des Deux Amis

Lesdeuxamis_2Mélac, receveur général des fermes à Lyon, apprend que son ami Aurelly, riche négociant, risque la banqueroute dès le lendemain. Aurelly doit d’importantes sommes d’argent à divers créanciers. Les fonds qui devaient servir au remboursement sont momentanément bloqués à la suite du décès inopiné de l’ami parisien qui les gérait. Mélac décide, à l’insu d’Aurelly, d’utiliser les sommes collectées en tant que receveur général. Or, le fermier général Saint-Alban vient justement en inspection et découvre le détournement de Mélac, qui refuse de s’expliquer pour protéger Aurelly du déshonneur. Aurelly, apprenant la malversation, demande à Mélac de s’expliquer, en vain. Il va à son tour proposer à Saint-Alban de rembourser les sommes dues par Mélac (avec les fonds dont il ne dispose plus). A ce drame financier vient s’ajouter un drame romantique, puisque Mélac fils souhaite épouser Pauline, la nièce d’Aurelly (on apprendra par la suite qu’elle est en réalité sa fille), dont Saint-Alban est également amoureux.

Un des premiers « drames bourgeois »lesdeuxamis_3

C’est Diderot qui évoque pour la première fois le « drame bourgeois« , qu’il nomme « genre sérieux », dans les Entretiens sur le Fils naturel. La pièce Les Deux Amis illustre parfaitement les caractéristiques de ce nouveau genre, entre comédie et tragédie. L’action se situe à Lyon dans le salon d’une maison bourgeoise.  La pièce se veut moralisatrice et exalte les vertus de l’amitié, de la solidarité et de l’altruisme. Malgré le sujet traité, il est à noter que tous les personnages sont vertueux. Aurelly est un « homme vif, honnête, franc et naïf », Mélac Père « un philosophe sensible », Saint-Alban, un « homme du monde estimable ». La dimension pathétique est renforcée par l’amour qui sera peut-être contrarié entre la jeune Pauline et le fils Mélac.
Le spectateur doit être ému par les malheurs qui menacent les personnages principaux. Au rire, Beaumarchais préfère « l’attendrissement » qu’inspire la « vertu persécutée » : «Je sors du spectacle meilleur que je n’y suis entré, par cela seul que j’ai été attendri.» (le genre dramatique sérieux). Une autre caractéristique du drame bourgeois, évoqué dans l’avertissement au lecteur (voir plus bas), est le développement de la pantomime qui permet d’exprimer passions et sentiments au travers des gestes et des attitudes des acteurs.

Les didascalies et la pantomime

Beaumarchais a choisi de décrire très précisément le jeu attendu des acteurs : les didascalies sont particulièrement nombreuses (le retraitement du texte en xml a été laborieux…). Beaumarchais s’en explique dans l’avertissement au lecteur. Son attention vis-à-vis des comédiens, notamment amateurs, est intéressante à souligner :

« Pour faciliter les positions théâtrales aux acteurs de province ou de société qui joueront ce drame, on a fait imprimer, au commencement de chaque scène, le nom des personnages, dans l’ordre où les comédiens français se sont placés, de la droite à la gauche, au regard des spectateurs. Le seul mouvement du milieu des scènes reste abandonné à l’intelligence des acteurs. Cette attention de tout indiquer peut paraître minutieuse aux indifférents; mais elle est agréable à ceux qui se destinent au théâtre ou qui en font leur amusement surtout s’ils savent avec quel soin les comédiens français les plus consommés dans leur art se consultent, et varient leurs positions théâtrales aux répétitions, jusqu’à ce qu’ils aient rencontré les plus favorables, qui sont alors consacrées, pour eux et leurs successeurs, dans le manuscrit déposé à leur bibliothèque. C’est en faveur des mêmes personnes que l’on a partout indiqué la pantomime. Elles sauront gré à celui qui s’est donné quelques peines pour leur en épargner; et si le drame, par cette façon de l’écrire, perd un peu de sa chaleur à la lecture, il y gagnera beaucoup de vérité à la représentation. »

L’accueil du public

Grimm, dans sa correspondance avec Diderot, évoque sévèrement à deux reprises Les Deux Amis, (Correspondance littéraire, philosophique et critique de Grimm et de Diderot depuis 1753 jusqu’en 1790, tome 6, pages 340 et 348 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5721827z). Il mentionne que le jour de la première représentation, un des ennemis de Beaumarchais ajouta la mention suivante sur l’affiche, sous le titre Les deux Amis, « par un auteur qui n’en a aucun ». Il évoque également un épigramme anonyme :

« J’ai vu de Beaumarchais cette pièce ridicule
Et je vais, en un mot, vous dire ce que c’est
C’est un change où l’argent circule
Sans produire aucun intérêt ».

Si à Paris le public est mitigé, voire hostile, les villes commerçantes lui font un meilleur accueil. Dans une lettre du 17 octobre 1770, Beaumarchais se réjouit : « elle a été jouée à Lyon, à Marseille et à Rouen avec le plus grand succès ».

Le thème de l’argent

Dans cette pièce, comme dans le Faiseur de Balzac ou dans de nombreuses comédies de Molière, l’argent est un thème majeur. Ce n’est pas un hasard si cette thématique est au centre de nombreuses œuvres dramatiques. Ces auteurs, comme beaucoup d’autres, redoutent de ne pouvoir vivre de leur art.

Cette chronique est l’occasion de rendre hommage à Beaumarchais, à l’origine de la première société des auteurs dramatiques.

Beaumarchais et le droit d’auteur

Le 3 juillet 1777, lors d’un repas auquel il convie une trentaine d’auteurs, Beaumarchais propose la fondation de la première société des auteurs dramatiques. Après le succès du Barbier de Séville, Beaumarchais souhaite défendre le droit des auteurs face au monopole des Comédiens français et redéfinir les conditions de rétribution des auteurs,. Le combat qu’il mène aboutit à la reconnaissance légale du droit d’auteur par l’Assemblée Constituante le 13 janvier 1791. C’est la première loi édictée dans le monde pour protéger les auteurs et leurs droits. Le droit de représentation sera reconnu par les décrets de janvier 1791, le droit de reproduction en 1793. La loi Le Chapelier confère aux auteurs un monopole d’exploitation sur la reproduction et la représentation de leurs œuvres : les auteurs ont désormais le droit de vivre du fruit de leur travail.

Sources des illustrations
Théâtre complet de Beaumarchais. T. 1 / réimpression des éd. princeps, avec les variantes des ms originaux, publ. pour la première fois, par G. d’Heylli et F. de Marescot, 1869-1871, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k213564k

Oeuvres complètes de Beaumarchais . Nouvelle édition, augmentée de quatre pièces de théâtre et de documents divers inédits, avec une introduction par M. Édouard Fournier. Ornée de 20 portr. en pied coloriés, dessinés par M. Émile Bayard – 1876 http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62317430

Oeuvres complètes de Beaumarchais. Nouvelle édition, augmentée de quatre pièces de théâtre et de documents divers inédits, avec une introduction par M. Édouard Fournier. Ornée de 20 portr. en pied coloriés, dessinés par M. Émile Bayard http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k62317430

Antigone de Jean de Rotrou

Antigone_rotrouPour cette première chronique sur les œuvres théâtrales du domaine public, nous avons choisi de mettre en avant une pièce du répertoire classique, qui a connu un réel succès en 1637. Racine lui rend d’ailleurs hommage dans sa préface de La Thébaïde.

Si les versions de Sophocle, Anouilh, Cocteau ou Brecht font régulièrement l’objet de nouvelles mises en scène, l’Antigone de Rotrou est moins connue, malgré la beauté du verbe, la force des personnages et une dramaturgie particulièrement maîtrisée illustrant le déchirement entre amour et devoir, respect et rébellion contre l’autorité paternelle, soumission à l’ordre tyrannique et résistance…

A lire (à voix haute) ou à jouer, cette pièce est un vrai régal : on savoure les monologues lyriques et pathétiques, mais aussi les dialogues très rythmés avec quelques remarquables stichomythies (partie de dialogue d’une pièce de théâtre où se succèdent de courtes répliques). Aux côtés de l’héroïne Antigone, de très beaux rôles : la tragique Jocaste, le cruel Créon, la trop sage Ismène, la courageuse Argie, le tendre Hémon, les frères ennemis Etéocle et Polynice…

Téléchargez le texte intégralement et gratuitement. 

Un extrait du dialogue de la scène 5 de l’acte 4 entre Créon, roi de Thèbes et son fils Hémon, amant d’Antigone.

CRÉON
Ô conseil, ô prière et ridicule et folle !
Que j’apprenne si vieux d’une si jeune école !

HÉMON
Ne regardez pas l’âge, et pesez la raison.

CRÉON
La raison n’est pas mûre en si verte saison.
Appelles-tu raison de faire honneur au crime ?

HÉMON
Non, s’il passe pour tel ailleurs qu’en votre estime.

CRÉON
Qui m’a désobéi mérite le trépas.

HÉMON
Le peuple toutefois ne le confesse pas.

CRÉON
Lui-même est criminel s’il censure son prince.

HÉMON
Faites donc le procès à toute le province.

CRÉON
Elle et ses habitants sont esclaves des rois.

HÉMON
Oui, si les rois aussi sont esclaves des lois.

CRÉON
La folle passion qui possède ton âme
Te fait insolemment parler pour une femme,
Et de son intérêt te rend aussi jaloux.

HÉMON
Vous seriez femme donc, car je parle de vous.

CRÉON
Tu contestes, mutin, contre ton propre père ?

HÉMON
J’ai cru vous conseiller, et non pas vous déplaire.

CRÉON
Ne m’est-il pas permis de conserver mon droit ?

HÉMON
Non, s’il prive les dieux de l’honneur qu’on leur doit.

CRÉON
Vil esclave de femme, esprit lâche et débile !

HÉMON
Je n’ai fait action ni lâche ni servile.

CRÉON
Parler pour une fille est ton plus digne emploi.

HÉMON
Je parle pour les dieux, et pour vous et pour moi.

CRÉON
N’espère pas enfin l’épouser jamais vive.

HÉMON
Elle ne mourra pas qu’un autre ne la suive.

CRÉON
M’oses-tu menacer ?

HÉMON
Je n’avancerais rien.
Envers qui ne veut ni ne peut faire bien.

CRÉON
Ce fol à m’outrager encore persévère !

HÉMON
Je vous dirais bien pis si vous n’étiez mon père.

CRÉON
Va, coeur efféminé ; va lâche, sors d’ici !

HÉMON
Vous voulez donc parler sans que l’on parle aussi ?

CRÉON
Oui, traître, je le veux, et bientôt pour salaire
De ta présomption va t’apprendre à te taire
Et ne chérir pas tant ce qui m’est odieux.
Soldats, amenez-la, qu’on l’égorge à ses yeux.

HÉMON
Ce ne sera jamais au moins en ma présence
Que l’on accomplira cette injuste sentence.
Faites à vos flatteurs autoriser vos lois,
Et voyez votre fils pour la dernière fois.

Pour aller plus loin :

Article en libre accès : 
Thouret Clotilde, « Le monologue dans le théâtre de Rotrou : une convention baroque, entre ornement et dramaturgie de la pensée. », Littératures classiques 2/2007 (N° 63) , p. 207-221
URL : www.cairn.info/revue-litteratures-classiques1-2007-2-page-207.htm
DOI : 10.3917/licla.063.0207

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