4 actes

Pièce en quatre actes

La Princesse lointaine d’Edmond Rostand

Drame en quatre actes et en vers représenté pour la première fois à Paris le 5 avril 1895 sur le théâtre de la Renaissance.
Distribution : 21 hommes, 2 femmes
Texte à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argument

Joffroy Rudel,  un troubadour aquitain, a tant chanté la beauté légendaire de la princesse de Tripoli, Mélissinde, qu’il en est tombé amoureux. Sentant sa dernière heure venir, il veut enfin la rencontrer et organise une expédition, accompagné de son fidèle ami Bertrand d’Allamanon, troubadour de Provence. Le navire arrive près de Tripoli mais Joffroy est trop faible pour aller à la rencontre de Mélissinde. Il charge Bertrand de la convaincre de venir à son chevet. Bertrand réussit à pénétrer dans le palais. Mélissinde en le voyant est persuadée qu’il est Joffroy Rudel, dont elle connaît les poèmes et la chanson de la Princesse lointaine. Elle en tombe follement amoureuse. Bertrand, également sous le charme, lui transmet le message de Joffroy Rudel mais Mélissinde refuse d’aller le voir et persuade Bertrand de rester avec elle. Le remords peu à peu les ronge et ils décident de se rendre auprès du mourant. Mélissinde se rend compte que c’est Joffroy Rudel qu’elle aime.

Edmond Rostand s’inspire de la vida de Jaufre Rudel. De la famille des princes de Blaye (Gironde), il tomba amoureux de la comtesse de Tripoli sans l’avoir jamais vue et lui a consacré de nombreux vers. Pour la connaître il fit le voyage d’Orient mais tomba malade (voir la notice sur le site du Centre Interrégional de Développement de l’Occitan). Avant Rostand, Pétrarque a également évoqué cette figure (Trionfi III) de Giaufrè Rudel, ch’usò la vela e’l remo a cercar la sua morte (Jaufré Rudel, avec la voile et la rame à la recherche de sa mort).

La création

Le succès des Romanesques à la Comédie-Française permet à Edmond Rostand de rencontrer Sarah Bernhardt, alors en pleine gloire et à la recherche de nouveaux talents et d’argent pour son théâtre. Elle  lui commande le rôle de Mélissinde. Mucha, ami et sous contrat d’exclusivité avec Sarah Bernhardt, co-produisit la pièce et réalisa des dessins des costumes, bijoux, décors, programme du spectacle… La pièce est créée le 5 avril 1895 dans le Théâtre Sarah Bernhardt (Théâtre de la Renaissance). Elle connaît un grand succès mais se solde par un désastre financier pour l’actrice.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8406054g
Scène de la Princesse lointaine dans le Théâtre Illustré, avril 1895. Source : BnF/Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84387261/f6.item
Sarah Bernhardt dans la Princesse lointaine. Source : BnF/Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84387261/f57.item
Sarah Bernhardt dans le rôle de Mélissinde. Etude pour le panneau décoratif du foyer du théâtre Sarah Bernhardt à Paris par Mucha.Source : Bnf/Gallica


Pour en savoir plus

Bourgeois Jean, « Une trilogie d’Edmond Rostand : La Princesse lointaine, La Samaritaine, Cyrano de Bergerac », L’information littéraire, 2008/2 (Vol. 60), p. 27-38. URL : http://www.cairn.info/revue-l-information-litteraire-2008-2-page-27.htm

La critique impitoyable de GB Shaw La Princesse lointaine d’Edmond Rostand, au Daly’s Théâtre, le 17 juin 1895 (22 juin 1895) dans BRENNAN, Paul (dir.) ; DUBOST, Thierry (dir.). G. B. Shaw : un dramaturge engagé.Nouvelle édition [en ligne]. Caen : Presses universitaires de Caen, 1998 (généré le 01 mai 2017). Disponible sur Internet : http://books.openedition.org/puc/986

La critique de Jules Lemaitre dans Impressions de théâtre, 9ème série sur le site de l’OBVIL.

Tout le Théâtre d’Edmond Rostand sur Libre Théâtre
Biographie d’Edmond Rostand sur Libre Théâtre

Chantecler d’Edmond Rostand

Pièce en quatre actes et en vers représentée pour la première fois au Théâtre de la Porte-Saint-Martin, le 7 février 1910.
Distribution : 54 hommes, 15 femmes
Texte intégral à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argumentaire

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5725929c
Guitry en Chantecler par Sem, dans Modes de mars 1910. Source : BnF/Gallica

Chantecler, un fier coq règne sur la basse-cour. Son chant est tellement puissant qu’il est persuadé qu’il fait se lever le soleil chaque jour. Il est détesté des animaux nocturnes et subit les jalousies des autres animaux de la basse-cour. Chantecler tombe amoureux d’une faisane. Il se rend dans le salon littéraire de la Pintade où il tombe dans un guet-apens : il est contraint de se battre jusqu’à la mort avec un autre coq. Il sort vainqueur de cette épreuve et défend la basse-cour contre les menaces d’un épervier. Il part avec la faisane pour la forêt ; jalouse, elle lui demande de ne plus chanter, mais elle se sacrifiera par amour lorsqu’un chasseur arrivera ; mais c’est le rossignol à la voix d’or qui sera touché par les balles.

Une très belle fable poétique, lyrique et allégorique où par le truchement des animaux, tous les défauts humains sont raillés : la vanité, l’ambition, la jalousie, le cynisme, la prétention…
On croise, entre autres,  un vieux chat Matousalem, un gymkhanard, « une vieille insensible aux problèmes moraux et qui fait du footing en costume à carreaux », un paon modern-style, le Prince de l’Adjectif Inopiné… dans une  garden-potager-party.  La pièce offre de multiples morceaux de bravoure : l’hymne au soleil, le chœur des oiseaux, le chant du rossignol ou la tirade du coq célèbre pour ses allitérations.

    Oui, Coqs affectant des formes incongrues,
Coquemars, Cauchemars, Coqs et Coquecigrues,
Coiffés de cocotiers supercoquentieux…
– La fureur comme un Paon me fait parler, Messieurs ! J’allitère !… –
Et s’amusant à les étourdir d’une volubilité caquetante et gutturale
Oui, Coquards cocardés de coquilles,
Coquardeaux Coquebins, Coquelets, Cocodrilles,
Au lieu d’être coquets de vos cocoricos,
Vous rêviez d’être, ô Coqs ! de drôles de cocos !
Oui, Mode ! pour que d’eux tu t’emberlucoquasses,
Coquine ! ils n’ont voulu, ces Coqs, qu’être cocasses !
Mais, Coquins ! le cocasse exige un Nicolet !
On n’est jamais assez cocasse quand on l’est !
Mais qu’un Coq, au coccyx, ait plus que vous de ruches,
Vous passez, Cocodès, comme des coqueluches !
Mais songez que demain, Coquefredouilles ! mais
Songez qu’après-demain, malgré, Coqueplumets !
Tous ces coqueluchons dont on s’emberlucoque,
Un plus cocasse Coq peut sortir d’une coque,
– Puisque le Cocassier, pour varier ses stocks,
Peut plus cocassement cocufier des Coqs !
– Et vous ne serez plus, vieux Cocâtres qu’on casse,
Que des coqs rococos pour ce coq plus cocasse !

La création

La pièce devait être originellement jouée par Coquelin qui décéda avant la première. Lucien Guitry le remplaça dans le rôle titre. Après le succès de Cyrano et de L’Aiglon, les critiques et spectateurs attendaient avec impatience la nouvelle création d’Edmond Rostand. Mais la forme de Chantecler déconcerte.  Malgré certaines critiques haineuses (notamment du côté de la presse nationaliste) ou dubitatives, le public se presse nombreux. La pièce part ensuite en tournée dans toute la France et à l’étranger.

Léon Blum raconte la création de Chantecler dans Comœdia (numéro complet ci-dessous)

« Je ne m’amuserai pas à ruser avec la curiosité du public. Des circonstances de tout ordre, et dont le concours ne se retrouvera peut-être plus, ont fait de Chantecler l’événement dramatique le plus extraordinaire, le plus passionnément attendu dont l’histoire du théâtre ait connaissance. Ni le Mariage de Figaro, ni même Hernani ne provoquèrent une telle attente, un tel espoir, une telle fièvre. Ce qu’on réclame du critique, dans cette occasion, ce sont moins des considérations nuancées et balancées qu’une constatation franche du fait. On veut savoir « ce que ça vaut » et « comment ça a marché. » Ce n’est pas une opinion qu’on exige, c’est un verdict.

Pour moi, je déclare sans hésiter que Chantecler a grandi l’idée que je me faisais de M. Edmond Rostand. J’admire d’abord qu’au lieu de s’assurer, avec quelque nouveau Cyrano, la certitude tranquille d’un nouveau triomphe, il ait intrépidement couru une aventure, un risque, un péril. J’admire qu’il ait non seulement cherché du nouveau, mais tenté de l’extraordinaire, qu’il se soit engagé, livré tout entier dans la plus difficile partie. J’ajoute qu’à mon avis, Chantecler est, par sa valeur littéraire intrinsèque, l’œuvre la plus belle que M. Rostand ait encore donnée. Jamais encore il n’avait fourni de façon plus convaincante la preuve de ses dons d’artiste et de poète. Ni Cyrano ni même l’Aiglon ne s’égalent aux meilleures parties de Chantecler. Maintenant, je dois reconnaître, avec la même netteté, que l’accueil fait à Chantecler ne fut pas ce triomphe incontesté, continu, unanime que les amis de l’auteur espéraient, et que le public entier escomptait joyeusement avec eux.

Le prologue et les deux premiers actes ne furent qu’une longue acclamation. Dès le commencement du troisième acte, au contraire, on sentait sourdre un malaise, on sentait se former une résistance. Résistance dont finalement M. Rostand est venu à bout, et qui ne fait peut-être qu’ajouter au prix du succès, mais qui en a cependant modifié le caractère. Ce n’est pas que personne fût insensible aux beautés certaines du poème. Elles étaient accueillies avec joie, ou même avec une sorte d’avidité et marquées aussitôt par des transports enthousiastes. Pourtant un sentiment confus avertissait les spectateurs que le développement de l’œuvre n’était pas précisément ce qu’il pouvait être, ce qu’il devait être. Et ce serait forcer les choses que de dire qu’il y eut une déception ; mais il y eut certainement un malaise. Je supplie qu’on ne se méprenne pas sur le sens de ces termes. Je ne procède pas ici par circonlocution ou par atténuation polie et l’on se méprendrait gravement si l’on essayait de « lire entre les lignes ». Je dis toute la vérité. Grossir l’expression de ma pensée ne serait pas la rétablir mais la trahir.

Comment expliquer cependant ce sentiment de malaise, d’incertitude ? Je ne crois pas, pour ma part, qu’il procède dans une mesure quelconque de la forme qu’a donnée M. Rostand à l’affabulation dramatique de son œuvre. »

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9005237k
Les Animaux de Chantecler : Le chat (Chabat), la pintade (Augustine Leriche), la poule faisane (Simone), le coq superbe (Lucien Guitry) etc… : affiche de Daniel de Losques en 1910. Source : BnF/Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53130084h
Lucien Guitry dans « Chantecler » d’Edmond Rostand / dessin de Yves Marevéry, 1910. Source : BnF/Gallica

Lien vers quelques articles lors de la création :

  • Revue illustrée  du 25 février 1910. Source : BnF/Gallica
  • Article enthousiaste dans Modes, de mars 1910. Source : BnF/Gallica
  • Numéro spécial de Comœdia illustré consacré à Chanteclerc, 19 février 1910.

Autres mises en scène

Du fait du nombre d’acteurs et de costumes nécessaires, cette pièce est rarement mise en scène.

Chantecler a été mis en scène par Jérôme Savary en 1994.

Jean-Christophe Averty a réalisé une adaptation pour la télévision en 1976 avec Jean Piat dans le rôle titre (extrait sur le site de l’INA, version intégrale payante sur le site de l’INA).
Pour aller plus loin
Géraldine Vogel, « Les didascalies dans le théâtre d’Edmond Rostand : entre verbe et action poétique », Coulisses [En ligne], 39 | Automne 2009, mis en ligne le 30 novembre 2016, consulté le 16 avril 2017. URL : http://coulisses.revues.org/979

Les Corbeaux de Henry Becque

Drame en quatre actes et en prose, représenté pour la première fois à la Comédie-Française le 14 septembre 1882.
Distribution : 12 hommes, 6 femmes
Texte à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argument

http://www.nga.gov/content/ngaweb/Collection/art-object-page.93967.html
Les Honnêtes femmes; Conférence, Poésies inédites d’Henry Becque; La Parisienne, 1904, Gift of The Atlas Foundation 1995.76.8. Source : NGA Image

Vigneron, un industriel prospère, coule des jours heureux, entouré de sa femme, de leurs trois filles, Blanche, Marie et Judith et de son fils. Hélas, Vigneron meurt brusquement. Teissier, l’ancien associé, Bourdon le notaire et Lefort l’architecte s’entendent pour spolier et ruiner la famille. Le fils s’engage dans l’armée et les quatre femmes se retrouvent totalement démunies. Aucune aide ne viendra, ni du fiancé de Blanche, qui rompt toute relation sous la pression de sa mère, ni du jeune professeur de musique de Judith. La seule issue sera le sacrifice de Marie, qui accepte d’épouser le vieil associé Teissier :  le vieux corbeau protégera désormais la famille des rapaces qui continuent à roder.

Naissance et tribulations des « Corbeaux »

« J’avais été frappé bien des fois lorsqu’une famille a perdu son chef, de tous les dangers qu’elle court et de la ruine où elle tombe bien souvent. C’était une thèse si l’on veut. C’était plutôt une observation générale très simple et très nette, et qui pouvait encadrer une pièce et ne pas nuire à la vérité des caractères.
En réalité, j’ai l’horreur des pièces à thèses, qui sont presque toujours de très mauvaises thèses. Je ne suis pas un penseur, il faut bien que j’en convienne. (…)
Enfin, on me permettra bien de le dire, il y a chez moi un révolutionnaire sentimental. Je me figure par moments que les difficultés de ma vie sont venues de là. Je n’ai jamais eu beaucoup de goût pour les assassins, les hystériques, les alcooliques, pour les martyrs de l’hérédité et les victimes de l’évolutions. Je le répète, je ne suis pas un penseur et les scélérats scientifiques ont bien de la peine à m’intéresser. Mais j’aime les innocents, les dépourvus, les accablés, ceux qui se débattent contre la force et toutes les tyrannies. (…)
Les Corbeaux, comme je m’y attendais bien, me demandèrent une année de travail. Cet instant de ma vie est le plus heureux dont je me souvienne. (…)
J’ai promené Les Corbeaux pendant cinq ans. Ils ont fait les deux grands tournées, celles des directeurs et celle des auteurs. Les Corbeaux ont été refusés au Vaudeville par Deslandes, au Gymnase par Montigny, à l’Odéon par Duquesnel, à la Porte-Saint-Martin par Rett et Larochelle. Ballande de la Gaité, Clèdes du théâtre Cluny, un troisième Laforest, qui avait ouvert à l’Ambigu le Théâtre des Jeunes n’ont pas désiré la connaître. Montigny après la Navette, les a refusés une seconde fois. Koning, lorsqu’il a remplacé Montigny, les a refusés, et La Rounat, lorsqu’il a remplacé Duquesnel les a refusés.
J’ai porté Les Corbeaux à Cadol, et ils ne l’ont pas intéressé.
Dumas devait les refaire en huit jours et les a gardés un an sans y toucher. Sardou, toujours intelligent et serviable, m’a conseillé de les laisser tels quels et n’a pas réussi à les placer. Gondinet m’en a dit autant et n’a pas été plus heureux que Sardou.
Ma pièce était condamnée. les belles ardeurs de Michel Pauper étaient loin ; je n’étais plus ni assez jeune, ni assez confiant pour louer un théâtre une seconde fois. Je ne pouvais plus, si je voulais tirer parti de mon travail, que le publier. La maison Tesse imprima Les Corbeaux. Au dernier moment, à l’extrême minute, lorsqu’on attendait le bon à tirer et que j’avais déjà la plume à la main, je m’arrêtait, je regardai autour de moi, je cherchai une inspiration, une chance, un hasard. Je pensai à Edouard Thierry, j’étais sauvé… »

Henry Becque, Souvenirs d’un auteur dramatique, 1895 sur Gallica

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b105019625/f46.item
Coupure de presse.  Représentation du 21 avril 1937 à la Comédie-Française. Source : BnF/Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b105019625/f54.item
Coupure de presse. Représentation du 21 avril 1937. Source : BnF/Gallica


Les Corbeaux sur le site de l’INA

Autour de la mise en scène de la pièce en 1982 par Jean-Pierre Vincent à La Comédie-Française :
Grand entretien avec Jean-Pierre Vincent, par Dominique Darzacq. Lien sur le site de l’INA
Extraits de la pièce « Les corbeaux » avec une interview de Jean Pierre Vincent, le metteur en scène et le peintre Jean Paul Chambas qui a signé les décors. Lien sur le site de l’INA
Pierre Dux rappelle son petit rôle de vieux domestique dans « Les corbeaux » à ses débuts. A cette époque une Célimène de 55 ans ne choquait pas. Sous l’influence du cinéma, les acteurs ont aujourd’hui des emplois conformes à leur âge, mais à la dernière reprise des « Corbeaux », il a constaté que la façon de jouer n’a pas changé. Lien sur le site de l’INA
Denise Gence résume l’intrigue des « Corbeaux » de nouveau à l’affiche de la Comédie Française. Le metteur en scène Jean-Pierre Vincent évoque la personnalité et l’oeuvre de l’auteur : Henry Becque. Différents extraits illustrent leurs propos. Lien sur le site de l’INA
Extrait de la pièce « Les Corbeaux » d’Henry BECQUE, mise en scène par Jean-Pierre Vincent à la Comédie Française, avec Denise Gence, Claude Winter, Michel Aumont. Lien sur le site de l’INA

Pour aller plus loin

Eric Allen Dawson, Henry Becque, sa vie et son théâtre, 1923 sur archive.org.
« Les Corbeaux d’Henry Becque et Les Affaires sont les affaires d’Octave Mirbeau » par Philippe BARON Université de Franche-Comté. Article sur le site mirbeau.asso.fr

Mise en scène d’Anne Bisang,  dossier de presse et dossier pédagogique sur le site de la Comédie de Genève

Les deux critiques d’Arthur Heulhard parues les 21 et 28 septembre 1882 dans le Courrier de l’art  à consulter sur l’excellent site consacré à cet auteur http://www.arthurheulhard.altervista.org/  (Heulhard et la critique dramatique – Courrier de l’Art, pages 92 à 96). Extrait : « M. Becque lui est apparu comme un bourreau qui marque au fer rouge l’épaule droite des gens d’affaires que le fracas des ruines parisiennes attire, comme l’odeur des cadavres attire les corbeaux. On a trouvé l’exécution un peu cruelle et la poigne de M. Becque plus rude encore que les griffes des bas oiseaux de proie qu’il décrit. J’avoue que toutes mes sympathies sont pour l’homme qui a en lui le pouvoir et la volonté de risquer de pareilles peintures de moeurs, et j’estime qu’il y a hypocrisie et lâcheté littéraire à ne pas le défendre. »

Lien vers la Biographie de Henry Becque sur Libre Théâtre
Lien vers le Théâtre de Henry Becque sur Libre Théâtre


Publication aux Editions La Comédiathèque

« Les Corbeaux » débute comme un vaudeville : nous sommes dans le salon d’un riche industriel entouré de ses enfants, alors que l’on prépare les fiançailles d’une de ses filles. La comédie tourne rapidement au drame réaliste lorsque le père de famille meurt brusquement. Associé, notaire et fournisseurs vont s’entendre pour ruiner cette famille candide et sans défense.

Henry Becque met en œuvre une mécanique impitoyable : au mariage d’amour évoqué joyeusement dans les premières scènes répond la proposition cynique et cruelle du dernier acte, particulièrement noir.

Distribution : 12 hommes, 6 femmes (plusieurs rôles muets peuvent être regroupés)

ISBN 978-237705-078-9
Février 2017
100 pages ; 18 x 12 cm ; broché.
Prix TTC : 13,00 €

Disponible chez votre libraire ou en ligne sur les sites suivants :

Thermidor de Victorien Sardou

Drame historique en quatre actes, représenté pour la première fois le 24 janvier 1891 à la Comédie-Française puis retiré de l’affiche le 27 janvier. La pièce a été représentée dans une nouvelle version le 2 mars 1896 au Théâtre de la Porte Saint-Martin. La version retraitée par Libre Théâtre est la seconde version, saisie à partir de l’édition de l’Illustration théâtrale 1906 N° 38 (Source : Bodleian Libraries. Les dernières pages manquent sur le document numérisé ; un exemplaire papier a été consulté par Libre Théâtre à la Bibliothèque de la Comédie-Française pour compléter la saisie).
Distribution : 25 hommes et 4 femmes
Texte à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre.

L’argument

 À la veille du 9 Thermidor, deux amis se retrouvent par hasard. Labussière est un comédien qui a dû se reconvertir  : il est maintenant commis aux écritures dans le bureau des détenus du Comité de Salut public et profite de cette place pour sauver quelques amis de la guillotine, en escamotant leurs dossiers. Martial Hugon, commandant d’artillerie, aide de camp de Jourdan, est à la recherche de Fabienne Lecoulteux, une jeune femme qu’il a recueillie et qu’il a confiée à une parente. Fait prisonnier à la guerre, il n’a pu donner de ses nouvelles pendant de longs mois. De retour à Paris, il recherche Fabienne qui a disparu à la suite du décès de la vieille parente. Il la retrouve alors qu’elle est poursuivie par des femmes qui l’accuse d’être une aristocrate religieuse. Grâce à Labussière, elle peut s’échapper. Une fois à l’abri, Labussière recommande à Martial de convaincre Fabienne de partir avec lui de Paris et de l’épouser. Mais Fabienne refuse  : pensant que Martial était décédé, elle a prononcé ses vœux. Martial réussit à la convaincre de renoncer à ces vœux, mais une lettre qu’elle a adressé à ses amies religieuses est interceptée et elle est arrêtée, alors que Labussière et Martial se trouvent dans les bureaux du Comité de Salut Public. Martial demande à Labussière d’échanger le dossier de Fabienne contre un autre dossier. On annonce alors l’arrestation de Robespierre mais les tribunaux fonctionnent toujours. Martial et Labussière se précipitent à la Conciergerie où Fabienne est enfermée. Elle est condamnée. La seule façon de la sauver est de déclarer qu’elle est enceinte  : elle refuse ce déshonneur…

Dans la première version de la pièce, Martial Hugon insulte les bourreaux et est abattu. Fabienne Lecoulteux est ensuite menée à la guillotine.

Dans la seconde version de 1896, un épisode est ajouté  :  à l’instigation de Labussière, devant le courage de Fabienne les femmes du lavoir tentent de la sauver. Mais Fabienne refuse de signer le document où elle déclare être enceinte. Martial Hugon insulte les bourreaux et est abattu. Fabienne Lecoulteux est ensuite menée à la guillotine.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53118118x/f1.item
Le théâtre illustré, Thermidor, drame de M. Victorien Sardou, représenté à la Comédie-Française : scène finale du dernier acte : [estampe] / dessin de M. Édouard Zier [sig.] ; H. Dochy sc. [sig.] . 1891. Source : BnF/Gallica

Histoire de la pièce

La première de la pièce, le 24 janvier 1891 à la Comédie-Française rencontre un vif succès, mais lors de la deuxième représentation, de nombreux incidents se déroulent. La pièce est jugée réactionnaire par les républicains radicaux  : la République semble encore très fragile.
Clemenceau intervient à la tribune de la Chambre des députés le 29 janvier 1891 dans un célèbre discours. Il refuse de faire le tri entre « bons » et « mauvais » révolutionnaires. La Révolution française est un « bloc », qu’il faut accepter ou rejeter dans son intégralité, car le combat révolutionnaire continue.
Un extrait du discours  :

M. Clemenceau.
Messieurs, il a été joué à la Comédie Française une pièce évidemment dirigée contre la Révolution française. (Très bien ! très bien ! sur les mêmes bancs à gauche. – Dénégations au centre.) Il est temps d’écarter toutes les tartuferies auxquelles on a eu recours pour dissimuler la réalité. (Vifs applaudissements à gauche.) Assurément, on n’a pas osé faire ouvertement l’apologie de la monarchie contre la République. On ne pouvait pas le faire à la Comédie Française. On a pris un détour, on s’est caché derrière Danton. Depuis trois jours, tous nos monarchistes revendiquent à l’envi la succession de Danton. (Rires et applaudissements à gauche. – Interruptions à droite.)
J’admire, quant à moi, combien de dantonistes inattendus ont surgi tout à coup de ce côté (la droite) de la Chambre : (Applaudissements à gauche et au centre.)
Toute cette comédie n’eût pas dû revivre ici. Il est temps d’en finir avec ces tartuferies indignes de cette Assemblée. (Interruptions et bruit.)
Je dis et je répète, puisqu’on m’interrompt, que la pièce est tout entière dirigée contre la Révolution française. Voyez plutôt qui l’applaudit, et dites-moi qui pourrait s’y tromper.
….
Messieurs, que nous le voulions ou non, que cela nous plaise ou que cela nous choque, la Révolution française est un bloc. (Exclamations à droite. Nouveaux applaudissements à gauche.)
….
Et maintenant, si vous voulez savoir pourquoi, à la suite de cet événement sans importance d’un mauvais drame à la Comédie Française, il y a eu tant d’émotion dans Paris, et pourquoi il y a à l’heure présente tant d’émotion dans la Chambre, je vais vous le dire.
C’est que cette admirable Révolution par qui nous sommes n’est pas finie, c’est qu’elle dure encore, c’est que nous en sommes encore les acteurs, c’est que ce sont toujours les mêmes hommes qui se trouvent aux prises avec les mêmes ennemis.
Oui, ce que nos aïeux ont voulu, nous le voulons encore. (Applaudissements à gauche.)
Nous rencontrons les mêmes résistances. Vous êtes demeurés les mêmes ; nous n’avons pas changé. Il faut donc que la lutte dure jusqu’à ce que la victoire soit définitive.
En attendant, je vous le dis bien haut, nous ne laisserons pas salir la Révolution française par quelque spéculation que ce soit, nous ne le tolérerons pas ; et, si le Gouvernement n’avait pas fait son devoir, les citoyens auraient fait le leur.

Source : Assemblée nationale 

Victorien Sardou se défend en indiquant que la pièce dénonce seulement le despotisme de Robespierre et la Terreur.
La pièce est de nouveau à l’affiche en 1896 au Théâtre de la Porte Saint-Martin avec quelques modifications  : les femmes du lavoir tentent de sauver Fabienne.

Pour aller plus loin

POUFFARY Marion, « 1891, l’affaire Thermidor », Histoire, économie & société 2/2009 (28e année) , p. 87-108. sur  Cairn

Le discours de Clémenceau sur le site de l’Assemblée Nationale

Thermidor sera évoqué lors des Journées Particulières de la Comédie Française le 7 janvier 2017. Programme en cours. Site de la Comédie Française

Thermidor sur Gallica

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b531181161/f1
Comédie-Française, Thermidor, drame en quatre actes, de M. Victorien Sardou : Fabienne, Mme Bartet, quittant la Conciergerie pour marcher sur l’échafaud, 4me acte : [estampe] . 1891. Source : BnF/Gallica

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53118115k/f1.item
Comédie-Française, Thermidor, drame en quatre actes, de M. Victorien Sardou : la scène entre Labussière, Coquelin, et le pourvoyeur, au 1er acte : [estampe]. 1891. Source : BnF/Gallica

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53118120r/f1
Théâtre de la Porte-Saint-Martin, Thermidor, drame de M. V. Sardou : la Convention : [estampe] / F. Meaulle [sig.] . 1896. Source : BnF/Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8406014z/f18.item
Décor du premier acte. 1891. Source : BnF/Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8406014z/f23.item
Costumes de la Maison Millet. Théâtre de la Porte Saint-Martin, 02-03-1896 . Source : BnF/Gallica

Mille francs de récompense de Victor Hugo

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b52500972j/f57.item
Hugo sur le rocher des proscrits (Jersey). 1852. Source : BnF/Gallica

Drame en quatre actes écrit du 5 février au 29 mars 1866 et achevé le 15 avril.  Il n’a pas été représenté du vivant de Victor Hugo. Le 18 avril 1866 Victor Hugo refuse Mille francs de récompense à Marc Fournier qui le lui demandait pour l’Odéon : « Mon drame paraîtra le jour où la liberté reviendra ».
Mille francs de récompense  a été écrit par Victor Hugo en exil à Guernesey : quatre ans après Les Misérables, il reprend le thème de la fatalité sociale, traité avec humour grâce au très beau personnage de Glapieu, un voleur qui incarne paradoxalement la justice.
La pièce a été publiée en 1934 et représentée pour la première fois en 1961, mise en scène par Hubert Gignoux à la Comédie de l’Est. (Lien vers la notice du spectacle sur data.bnf.fr)
Distribution : 15 hommes, 2 femmes
Texte à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argument

Un hiver glacial et enneigé des années 1820, à Paris. Pourchassé par la police, en cavale, Glapieu se réfugie dans un appartement sinistre où vivent Zucchimo, un vieil homme ruiné et malade, sa fille et sa petite-fille.  Arrive Rousseline, agent d’affaires d’un riche banquier, le baron de Puencarral. Au nom de son patron, et pour une dette inférieure à quatre mille francs, Rousseline, accompagné d’huissiers, va faire procéder à la saisie des meubles. Mais il a un projet en tête et propose un marché aux deux femmes : il renoncera à la saisie, en échange de la main de Cyprienne….

Documents pédagogiques et études

Mise en scène Laurent Pelly en 2010 à la Comédie de Reims. Lien vers le dossier pédagogique.  Reportage sur CultureBox
Olivier BARA, Paroles de gueux et «prose de la vie»: Mille francs de récompense format doc / format pdf

Un extrait

Glapieuparaissant.
Il redescend du haut de l’escalier avec précaution, comme quelqu’un qui tâche d’amortir le bruit de ses pas.
Je suis très pensif, savez-vous ? Aucun moyen de gagner le toit par là-haut. Tout est fermé. J’ai l’honneur d’être dans une souricière. Le portier ne m’a pas vu passer. C’est bon, mais après ? À peine a-t-on résolu ce problème, entrer, qu’il faut résoudre celui-ci, sortir. Voilà la vie.
(Il ouvre la petite fenêtre et y passe sa tête, puis referme la fenêtre en faisant le moins de bruit possible.)
Toute l’escouade est encore là, dans la rue. Damnée police. Alguazils ! sbires ! infâmes curieux ! Ils ont l’air de chercher. Ils guettent. Peut-être ont-ils perdu ma piste. Vague espérance. Délibérons.
(Il croise les bras.)
Croiser les bras, c’est assembler son conseil. Que faire ? Redescendre ? Pas possible. Empoigné, comme dit monsieur le vicomte de Foucauld. Demeurer ici ? Pas possible. Les locataires montent et descendent. Qu’est-ce que je fais là ? Ma tenue manque de respectabilité. Dilemme : si je m’en retourne par où je suis venu, je suis pris. Si je reste, je suis pris. Pour bien posée, la question est bien posée. Mais que faire ?
(Il regarde la fenêtre.)
Comme c’est drôle, les oiseaux ! ça se moque de tout. Voler, quel bête de mot ! il a deux sens. L’un signifie liberté, l’autre signifie prison.
(Cris au dehors: «À la chie-en-lit !» Chants. Bruits de trompes. — On entend des trompes et du cornet à bouquin.)
Nous sommes en carnaval. Il y a pourtant des gens qui s’amusent ! La nature ne prend aucune part à ma détresse.
(Rêvant.)
Les agents m’ont reconnu, quels gueux ! Est-il possible de pourchasser un pauvre homme comme cela qui ne fait de mal à personne, uniquement parce qu’il a accompli autrefois une sottise. C’est !de mon vieux temps, j’étais enfant. C’est égal, ça me suit. Ça ne pardonne pas, une sottise. On flanque un pauvre diable en surveillance dans un trou de province, surveillance, ça veut dire famine, il ne peut pas gagner sa vie, il s’esquive, le voilà à Paris. Qu’est-ce que tu viens faire à Paris ? — Je viens devenir honnête homme, là. Paris est grand, Paris est bon ; je viens m’y perdre, et m’y retrouver. Je vais y changer de nom et y changer de métier. Voyons, veut-on de moi dans l’honnêteté ? Je viens planter dans le sol parisien l’oignon de la vertu, mais laissez-lui le temps de pousser, que diable ! Point. — Ah ! c’est toi, vaurien ! Et la police vous saute à la gorge. Et je n’ai plus que le choix de la cave ou du toit. Dans la cave avec les taupes, sur le toit avec les moineaux.
— Oh ! les oiseaux ! les oiseaux ! quel chef-d’œuvre ! C’est ça qui est toujours en rupture de ban.
(Rêvant.)
Ah ! ils ont le chat ! — Moi, j’ai monsieur Delavau.
(Rêvant.)
La première sottise, fil à la patte qui ne se casse jamais. O qui que vous soyez, qui ne voulez pas faire la deuxième sottise, ne faites pas la première. Je passais, j’étais gamin, le tiroir d’une fruitière était entr’ouvert, il bâillait, il avait l’air de s’ennuyer, je lui fis une farce, je lui chipai douze sous. On me happa, on me soutint que j’avais forcé le tiroir. J’avais un peu plus de seize ans. C’est grave. Quinze ans et onze mois, on est un polisson ; quinze ans et treize mois, on est un bandit. On me trouva des dispositions. On pensa que j’avais de l’étoffe. Je n’étais pas même un filou ; on me jugea digne de passer voleur. On me mit pour trois ans dans une maison d’éducation. À Poissy, j’appris là bien des choses utiles à la société. Du tiroir des fruitières, je m’élevai à la caisse des banquiers. Un professeur, qui avait vu Toulon en France et Horsemonger Lane, Newgate en Angleterre, m’expliqua le coffre-fort et la manière de s’en servir. Il m’inculqua les notions. Il m’enseigna que les meilleurs coffres-forts se font à Londres. Et encore il y a fabricant et fabricant. Il y a le coffre-fort facile et le coffre-fort difficile. Ça a ses mœurs, le coffre-fort. Ceux de Griffith sont bons, ceux de Tann sont excellents, ceux de Milner sont inviolables. Coffre-fort de Milner, pucelle d’Orléans. Eh bien, grâce à l’excellente méthode qui présidait à mon instruction, j’appris à venir à bout même d’une caisse Milner. Par exemple, pour une caisse Milner il faut sept heures de travail, tandis que pour une caisse Griffith, dix minutes suffisent. Ayez un coin. Si la rainure du coffre-fort repousse le coin, vous avez affaire à Milner. C’est sérieux.
Autrement, si le coin mord, vous n’êtes qu’en présence de Tann ou de Griffith ; quelques pesées en viennent à bout. Voilà quel a été mon baccalauréat. C’est ainsi qu’on devient, grâce à la sollicitude de la société, un homme à talents. Pourtant, quoique savant, je suis un mauvais voleur, au fond je n’ai point de vocation. Le cœur du mal, je ne l’ai pas. Je quitterais volontiers l’état, mais la police ne veut pas. La haute surveillance me tient et me dit : Tu as embrassé une carrière. Tu ne peux pas t’en dédire. La société s’est donné la peine de faire de toi un voleur, et n’entend pas en avoir le démenti. Reste où tu es et reste ce que tu es. — Je me débats. De là ma fugue en ce moment.
(Rêvant.)
— Monsieur Delavau. Pourquoi a-t-on changé le préfet de police ? Nous avions eu tant de peine à dresser l’autre. L’autre n’était que taquin, celui-ci me fait l’effet d’être tracassier. C’était monsieur Angles, c’est monsieur Delavau. Je n’aime pas les nouveaux visages. J’avais pris mon parti de monsieur Angles. Allons, maintenant qu’on a monsieur Delavau, qu’on le garde donc au moins, celui-là ! Puisqu’on l’a, je m’y tiens. Autant ce préfet de police-là qu’un autre. On ne gagne rien à ces renvois-là. On ne fait que changer de défauts. — Eh bien, j’y insiste, vous me croirez si vous voulez, monsieur le préfet, j’étais venu à Paris dans l’intention de faire peau neuve et d’être l’ornement de la société. J’ai eu toute ma vie plutôt du malheur qu’autre chose. Je sais bien, moi, que ma conscience ne me dit pas toutes les injures qu’on croit. N’importe, on me poursuit, on me traque, en province, à Paris, partout, le voilà, on me court après, je m’enfuis, je m’échappe, je me sauve, je pends mes jambes à mon cou, et je suis si essoufflé que je n’ai pas le temps de devenir vertueux. Chien de sort ! Ah ! c’est comme ça ! Eh bien ! on va voir, la première bonne action que je trouve à faire, je me jette dessus, je la fais. Ça mettra le bon Dieu dans son tort. — Mais, il faut pourtant que je me tire d’ici. Si les gens de police s’avisent de monter les escaliers, je suis fumé.
En voilà au moins pour deux ans. Coffré, bouclé, autant dire mort. Voyons, où sont les ressources ? La perche, père bon Dieu, à ce pauvre noyé ! Rendons-nous compte un peu de la maison. Ceci est le quatrième étage. Ces marches-ci (Montrant le tronçon d’escalier qui monte.) ne mènent à rien. Pas d’issue. Je suis dans l’escalier de service. Il y a un autre escalier, le grand, qui mène aux appartements sur le devant, l’escalier des maîtres. De ce côté-ci sont les petites chambres mansardées communiquant avec les appartements à plafonds qui donnent sur la rue. Par ici le toit doit être en pente, et ce serait bien le diable s’il n’y avait pas quelque cour, quelque ruelle, où je pourrais glisser et filer. Oui, c’est par l’autre côté du toit que je peux m’échapper. L’autre côté ! Mais il faut lui passer à travers le corps à cette maison. Comment faire ? Par là peut-être.
(Il se courbe devant la porte bâtarde et regarde par le trou de la serrure.)
Justement. J’aperçois là-bas au fond un recoin en mansarde avec une lucarne en tabatière. Ça ferait mon affaire. De là je gagne le toit, puis la cour, puis la rue, puis la liberté.

Pour en savoir plus sur Libre Théâtre :
Le Théâtre de Victor Hugo
Biographie de Victor Hugo à travers son théâtre
Victor Hugo, metteur en scène de ses pièces
L’humour dans le théâtre de Victor Hugo


Publication aux Editions La Comédiathèque

Un hiver glacial au début du XIXème siècle, à Paris. Pourchassé par la police, Glapieu se réfugie dans un appartement sinistre où vivent un vieil homme ruiné et malade, sa fille et sa petite-fille. Arrive Rousseline, agent d’affaires d’un riche banquier. Au nom de son patron, Rousseline, accompagné d’huissiers, va faire procéder à la saisie des meubles. Mais il propose un marché aux deux femmes : il renoncera à la saisie en échange de la main de la jeune fille…
Quatre ans après Les Misérables, Victor Hugo dénonce à nouveau l’injustice et la misère sociale à travers le regard ironique de Glapieu, voleur, poète et humaniste qui incarne paradoxalement la probité, mélange de Gavroche et de Jean Valjean.

ISBN 978-2-3770-5101-4
Juillet 2017
132 pages ; 18 x 12 cm ; broché.
Prix TTC : 14,00 €

Disponible chez votre libraire et sur les sites :

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53066341c
Caricature d’Eugène Labiche pour le Panthéon Nadar. Source : BnF/Gallica

Le Papa du prix d’honneur d’Eugène Labiche et Théodore Barrière

Comédie-vaudeville en quatre actes, représentée pour la 1re fois à Paris sur le Théâtre du Palais-Royal le 6 février 1868.
Distribution : 10 Hommes et 5 femmes
texte à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argument

Achille est un jeune homme brillant, qui fait la fierté de ses parents, les Gabaille, car il a reçu le prix d’honneur en latin. Il entretient une relation avec une jeune femme mariée Hermance dont il a un peu de mal à se défaire. Ses parents ont le projet de le marier à la jeune Cécile, fille de Dubichet, mais celui-ci exige que le jeune homme ait un emploi. Le père Gabaille va tout mettre en oeuvre pour lui obtenir cet emploi, mais Hermance est jalouse et va contrecarrer ces plans.

Un extrait

Hermance, s’asseyant au bureau, deuxième plan droite.
Je vous ai tout sacrifié, moi… ma réputation, mon repos, mon honneur… (Prenant sur le bureau un couteau catalan.) Oh ! si vous me trompiez!…
(Elle se lève sans changer de place.)
Achille, vivement.
Ne jouez pas avec ça !… c’est un couteau catalan…
Hermance, venant en scène.
Achille, je ne sais pas faire de phrases, moi, mais je vous le plongerais dans le cœur !
Achille.
Voilà une idée !
Hermance.
Et je me frapperais après… car jamais… jamais, entendez-vous ! je ne consentirais à aller m’asseoir sur les bancs de la cour d’assises… à m’exposer aux regards de cette foule avide, à subir les commentaires des journaux… jamais ! jamais!
(Elle passe au premier plan gauche en passant devant la table.)
Achille, à part.
Ah ! mais, elle n’est pas drôle ! (Haut.) Voulez-vous mettre vos petites pantoufles!
Hermance, assise à gauche du guéridon, colère.
Mais non ! Notre liaison, voyez-vous, est une de ces liaisons qui ne finissent qu’avec la vie!…
Achille, froidement et assis sur le fauteuil près du bureau.
Sans doute. (À part.) Elle va trop loin.
Hermance.
En me confiant à vous, j’ai rompu avec le monde… aucun lien ne me rattache à personne… Tu en doutes ?
Achille.
Je n’ai pas dit cela !
Hermance.
Si vous en doutez… (Se levant.) Eh bien ! je vais vous donner une preuve… Achille, voulez-vous que je quitte mon mari ?
Achille.
Ah ! non, par exemple !
Hermance.
Nous fuirons… nous irons loin, où vous voudrez, j’emporterai mes diamants… vous vendrez votre argenterie, celle de votre père.
Achille.
Ah ! permettez…
Hermance.
Vous hésitez ?
(Elle se dirige vers la cheminée au fond à droite.)
Achille.
Dame ! (À part.) Je veux bien faire une petite connaissance… mais je ne tiens pas à collaborer dans une grande machine pour le boulevard. (Haut.) Quitter votre mari !… mais avez-vous songé au monde… ce monde impitoyable…
Hermance, passant à gauche.
Je le brave !
Achille.
Et vos enfants ?
Hermance.
Je n’en ai pas !
Achille.
Ah ! c’est fâcheux… Mais votre mari !… ce brave et honnête homme… qui n’a pas craint de vous donner son nom…
Hermance.
Mon mari ! mais vous ne le connaissez pas !… Il est vieux, laid, sans esprit, il prend du tabac, il se sert de mouchoirs à carreaux… Et il va au bal de la Préfecture avec des souliers de castor !
Achille.
Cela n’empêche pas les qualités du cœur…

Les Trente Millions de Gladiator d’Eugène Labiche et Philippe Gille

Comédie-vaudeville en quatre actes, représentée pour la première fois, à Paris, sur le théâtre des Variétés, le 22 janvier 1875.
Distribution : 11 hommes, 6 femmes
Texte à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre.

L’argument

Eusèbe Potasse, préparateur à la pharmacie Bigouret, est amoureux de Suzanne de la Bondrée, une cocotte qui cherche un beau parti. Le journal annonce la visite de Gladiator, un riche Américain escorté de son valet fidèle Pepitt ; Suzanne met tout en oeuvre pour que Gladiator tombe amoureux d’elle. Eusèbe renvoyé par son patron à la suite de la découverte d’un mot doux envoyé à Suzanne,veut se suicider mais le dentiste Gredane le sauve et l’emmène chez lui. Bathilde, la fille de Gredane, qui était fiancée à Bigouret, tombe amoureuse d’Eusèbe…

Un extrait

Gladiator.
Alors tais-toi ! Ah ! mon ami, qu’elle est belle !
Pepitt.
Qui ça ?… Votre femme ?
Gladiator.
Non… mademoiselle Suzanne de La Bondrée !
Pepitt.
Ah ! bon ! celle du Jardin des Plantes… Allez !
Gladiator.
Quelle scène puissante et dramatique ! Je m’y vois encore. (Donnant son chapeau à Pepitt.) J’étais devant Capitaine… mon éléphant… que j’ai offert à la ménagerie… je commençais à m’ennuyer… quant tout à coup j’entends le froufrou d’une robe de soie… je me retourne, c’était elle que le hasard jetait sur ma route… Elle était suivie d’un noble vieillard…
Pepitt.
Mais je sais tout ça, puisque j’y étais !…
Gladiator.
Ne m’interromps pas…
Pepitt.
Allez !
Gladiator.
Elle s’avance comme une déesse… portant sur son chapeau une garniture de cerises et de raisins… elle tend de sa main blanche… As-tu remarqué sa main ?
Pepitt.
Ma foi non !
Gladiator.
Butor ! glaçon ! morceau de neige ! (Reprenant.) Elle tend de sa main blanche un petit pain de seigle à l’éléphant… il n’en fait qu’une bouchée… puis il avance de nouveau sa trompe…
Pepitt.
Comme il fait bien l’éléphant !
Gladiator.
Et, ne voyant rien venir, il la laisse tomber sur le chapeau garni de fruits… il l’enlève… les cheveux allaient suivre le chapeau… des cheveux magnifiques… elle pousse un cri… je m’élance… je parle à Capitaine… À ma voix, il tremble, se met à genoux, et fait des excuses, elle… me jette un long regard de reconnaissance… Son oncle, un homme qui parle peu, qui ne se livre pas… mais d’un très grand air… me remercie avec effusion… puis elle remonte en voiture en me laissant voir une jambe… une jambe !… As-tu remarqué sa jambe ?…
Pepitt.
Ma foi non !
Gladiator, le prenant au collet.
Misérable !… on te montre une jambe pareille et tu ne la regardes pas !
Pepitt,  se dégageant.
Aïe ! vous m’étranglez !… je la regarderai la prochaine fois !
Gladiator.
Cette femme !… j’éprouve pour elle une passion sauvage !… il me la faut à tout prix ! entends-tu ! à tout prix.
Il reprend son chapeau.
Pepitt.
Je ne demande pas mieux, moi ! mais si elle ne veut pas…
Gladiator.
Allons donc ! j’ai trente millions !
Pepitt.
Ça, c’est une raison.
Gladiator.
J’ai déjà soudoyé son concierge… je lui ai donné cinq mille francs…
Pepitt.
Oh ! c’est trop !… on ne donne pas cinq mille francs à un concierge… on donne cent sous… ou cinq francs !
Gladiator.
Il me remettra tous les matins une note pour me tenir au courant de ce qu’elle fera dans la journée. Voici celle d’aujourd’hui. (Il cherche dans son portefeuille.) Ecoute ça. (Haut.) « La personne ira ce soir au théâtre du Châtelet… »
Pepitt.
Comme il écrit bien, ce concierge !
Gladiator.
« Mes respects à Monsieur… » (Embrassant le papier avec transport.) Oh ! cher ange ! cher ange !
Pepitt,
à part.
Il embrasse la lettre du concierge, à présent.

Le Point de mire d’Eugène Labiche et Alfred Delacour

Comédie-vaudeville en quatre actes, représentée pour la première fois, à Compiègne, sur le théâtre de la Cour, le 4 décembre 1864 et à Paris, au Gymnase, le 12 décembre 1864.
Distribution : 10 hommes, 6 femmes
Texte à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argument

Duplan vient demander la main de Berthe, la fille de ses amis Carbonel pour son fils Maurice. Les Carbonel au départ peu enthousiastes sont ravis quand ils apprennent que Maurice a un million de dot. Les Pérugin, leurs meilleurs amis, sont jaloux de cette bonne fortune et Madame Pérugin va tout faire pour que Maurice s’éprenne de sa fille, Lucie, qui, elle, est amoureuse de l’architecte Jules Priés. Maurice ne cesse d’hésiter, entre la blonde Berthe et la brune Lucie…

Un extrait

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b8402645b/f1.item
Le point de mire, comédie d’Eugène Labiche et Delacour : programme de 1864. Source : BnF/ Gallica

Duplan.
Je n’ai qu’un mot à vous dire, j’irai droit au but… J’ai un fils que je désire marier le plus tôt possible… votre fille est jolie, bien élevée…
Madame Carbonel.
Permettez !…
Duplan.
Vous êtes de braves gens, de vieux amis, vous me plaisez.
Carbonel.
Bien flatté, mais la fortune de M. Maurice…
Duplan.
Elle est superbe ! vous avez bien connu mon frère Etienne.
Carbonel.
Non…
Duplan.
Le parrain de Maurice… une espèce d’idiot, qui n’a jamais pu être reçu bachelier… alors il est allé en Italie entreprendre des travaux de terrassement pour les chemins de fer… il m’écrivait tous les ans : « Ça va bien, embrasse Maurice pour moi. » J’embrassais Maurice parce que ça me faisait plaisir et je ne pensais plus à sa lettre. Mais voilà qu’il est mort, il y a six mois, en instituant mon fils son héritier.
M. et Madame Carbonel.
Eh bien ?
Duplan.
Eh bien, il lui a laissé cinquante mille livres de rente, cet imbécile-là.
M. et Madame Carbonel.
Un million !
Duplan.
Mon Dieu, oui, Maurice a un million de dot.
Madame Pérugin, paraissant à droite, à part.
Un million ! son fils !
Elle se retire vivement et écoute.
Carbonel.
Un million ! asseyez-vous donc… je vais rallumer le feu.
Madame Carbonel, éperdue.
Une bûche ! un tabouret !
Elle abaisse vivement sa robe.
Duplan, qu’on a fait asseoir sur le canapé entre Carbonel et sa femme.
C’est inutile… je m’en vais.
Madame Carbonel.
Cher monsieur Duplan… votre proposition nous trouble… nous émeut..
Carbonel.
Ah ! c’est que nous sommes des amis, de vieux amis !
Duplan.
Habitués du café Carbonel ! Ah çà ! pour se marier, il faut que les jeunes gens se connaissent ; où pourront-ils se voir ?

Le Voyage de Monsieur Perrichon d’Eugène Labiche et Édouard Martin

Comédie en quatre actes, représentée pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre du Gymnase, le 10 septembre 1860.
Distribution : 10 hommes, 2 femmes
Texte à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argument

Paris, Gare de Lyon, vers 1860. M. Perrichon, sa femme et sa fille Henriette, prennent pour la première fois le train, pour aller en vacances à Chamonix. Ils sont abordés par deux jeunes hommes, Armand Desroches et Daniel Savary, charmés par la fille de M. Perrichon, qu’ils ont rencontrée lors d’un bal.

Une lutte loyale mais acharnée commence entre les deux jeunes hommes, chacun voulant faire route avec la famille Perrichon pour gagner sa confiance et épouser ainsi Henriette. Armand Desroches sauve la vie de Monsieur Perrichon tombé dans une grotte : toute la famille lui en est très reconnaissante, mais Monsieur Perrichon est vexé de cet épisode. Voyant cela, Daniel Savary fait à son tour semblant de tomber dans une grotte et se fait sauver par M. Perrichon qui, très fier de lui, le prend désormais en affection et sous sa protection.

M. Perrichon se retrouve aussi dans une situation dangereuse lorsqu’il répond de façon insultante, par livre d’or interposé, à un ancien commandant ayant ironisé sur son orthographe. Ce militaire le retrouve douze jours plus tard, pour le défier en duel….

Illustrations de Yves Marevéry

Dessins réalisés lors de l’entrée au Répertoire de la Comédie-Française du Voyage de Monsieur Perrichon  en 1906.

Sur les mises en scène de cette pièce à la Comédie-Française, lire l’article d’Agathe Sanjuan, conservateur-archiviste de la Comédie-Française : « Labiche à la Comédie-Française : une cigale chez les fourmis » dans le dossier de presse réalisé à l’occasion de la mise en scène de la pièce par Julie Brochen en 2008.

« La création à la Comédie-Française le 10 mai 1906 a lieu en matinée, devant un public de collégiens, et sans que la critique n’ait été convoquée. Perrichon est interprété par Coquelin cadet. Cette ouverture en catimini ne laissait pas présager l’extraordinaire succès public qui ne s’est pas démenti (Le Voyage de monsieur Perrichon est la pièce de Labiche la plus souvent représentée à la Comédie-Française avec 556 représentations) »

Le Voyage de Monsieur Perrichon d'Eugène Labiche texte télécharger gratuitement
« Le voyage de Monsieur Perrichon » d’Eugène Labiche et Edouard Martin / dessin d’Yves Marevéry. 1906. Source : BnF/Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53049836h/f1.item
Dessin d’acteurs / Dessin d’Yves Marevéry. 1906. Source : BnF/Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b530497866/f1.item
Coquelin cadet, dessin d’ Yves Marevéry. 1906. Source : BnF/ Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53049781z/f1.item
Coquelin cadet. Dessin d’Yves Marevéry. 1906. Source : Bnf/Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b530497955/f1.item
Emile Dehelly et Georges Berr. Dessin d’Yves Marevéry. 1906. Source : BnF/ Gallica
http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53049781z/f1.item
Ernest Coquelin cadet. Dessin d’ Yves Marevéry. 1906. Source : BnF/Gallica

Un extrait

Perrichonému.
Daniel, mon ami, mon enfant !… votre main. (Il lui prend la main.) Je vous dois les plus douces émotions de ma vie… Sans moi, vous ne seriez qu’une masse informe et repoussante, ensevelie sous les frimas… Vous me devez tout, tout ! (Avec noblesse.) Je ne l’oublierai jamais !

Daniel
Ni moi !

Perrichonà Armand, en s’essuyant les yeux.
Ah ! jeune homme !… vous ne savez pas le plaisir qu’on éprouve à sauver son semblable.

Henriette
Mais, papa, Monsieur le sait bien, puisque tantôt…

Perrichonse rappelant.
Ah ! oui, c’est juste !… Monsieur l’aubergiste, apportez-moi le livre des voyageurs.

Madame Perrichon
Pour quoi faire ?

Perrichon
Avant de quitter ces lieux, je désire consacrer par une note le souvenir de cet événement !

L’Aubergisteapportant le registre.
Voilà, Monsieur.

Perrichon
Merci… Tiens, qui est-ce qui a écrit ça ?

Tous
Quoi donc ?

Perrichonlisant.
« Je ferai observer à M. Perrichon que la mer de Glace n’ayant pas d’enfant, l’e qu’il lui attribue devient un dévergondage grammatical. » Signé : « Le Commandant. »

Tous
Hein ?

Henriettebas, à son père.
Oui, papa ! mer ne prend pas d’e à la fin.

Perrichon
Je le savais ! Je vais lui répondre à ce monsieur. (Il prend une plume et écrit.) « Le Commandant est un paltoquet ! » Signé : « Perrichon. »


Le Voyage de Monsieur Perrichon sur le site de l’INA

http://fresques.ina.fr/en-scenes/fiche-media/Scenes10150/le-voyage-de-monsieur-perrichon.html
Adaptation télévisée. Source : INA

Adaptation pour la télévision (25 décembre 1958)
Réalisation de Stellio Lorenzi.

Début gratuit (version intégrale payante) sur le site de l’INA, autre extrait sur le site de l’INA.

Mise en scène de Jean Le Poulain à la Comédie-Française en 1982

Emission télévisée avec Jean Le Poulain, metteur en scène et interprète de la pièce d’Eugène Labiche « Le Voyage de Monsieur Perrichon » à la Comédie Française parle du personnage et du thème de la pièce.
Lien vers le site de l’INA

La main passe ! de Georges Feydeau

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b55009425c
Collection Charles Cros. Tube acoustique d’enregistrement et d’écoute, Manivelle, Cornet d’enregistrement en carton noir de marque Pathé, Diaphragme enregistreur Pathé, Diaphragme reproducteur Pathé, Disque en cire noire. 1912. Source : BnF/Gallica

Comédie en quatre actes de Georges Feydeau, représentée pour la première fois le 1er mars 1904 au Théâtre des Nouveautés. Vif succès : 211 représentations en 1904.
Distribution : 10 hommes – 4 femmes

Téléchargez le texte intégral de la pièce sur Libre Théâtre

L’argument

Alors qu’il veut enregistrer un message pour le mariage de sa sœur, Chanal reçoit la visite de Massenay qui veut lui louer un pied à terre. En réalité, il est l’amant de sa femme, dont est aussi amoureux le député Coustouillu. L’enregistreur restitue au mari les propos passionnés des deux amants. Chanal croit qu’il s’agit du timide député Coustouillu et l’envoie consommer l’adultère 21 rue du Colisée, où se trouvent Madame Chanal et son amant. Ceux-ci se sont endormis trop longtemps et se trouvent en situation délicate vis-à-vis de leurs conjoints respectifs. Survient Hubertin, ami de Chanal, qui, dans son ivresse, s’est trompé d’appartement. Finalement, maris trompés, amants et femmes trouvent des arrangements : divorces et remariages… jusqu’à ce que l’ancien mari réapparaisse, et que la nouvelle Mme Massenay affirme à son ancien mari Chanal : « Ah ! Je n’ai pas su t’apprécier, vois-tu… Si les maris pouvaient laisser leurs femmes avoir un ou deux amants pour leur permettre de comparer, il y aurait beaucoup plus de femmes fidèles ! … »

Sur Gallica, un recueil des articles de presse à l’occasion de la reprise en 1941 au Théâtre des Maturins. Voir notamment l’article de Jean Cocteau qui a réalisé les décors et les costumes de cette mise en scène.

La main passe !, au Théâtre ce soir, sur le site de l’INA (31 décembre 1972)

Vous pouvez explorer l’univers de Feydeau à travers les articles suivants :

– Le Théâtre de Georges Feydeau
– Biographie de Georges Feydeau
– Les ressorts comiques du langage chez Feydeau
– La politique dans les pièces de Feydeau
– Les progrès techniques dans les pièces de Feydeau
– Le vaudeville et Feydeau (à travers deux articles de Feydeau).

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