Les Pieds nickelés de Tristan Bernard

Comédie en un acte, représentée pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre de l’Œuvre le 15 Mars 1895, publiée en 1899 aux Editions Ollendorff (disponible sur Gallica), dédiée à  Louis-Alfred Natanson. Il s’agit de la première pièce de Tristan Bernard.
Distribution : 3 hommes, 4 femmes (plusieurs rôles peuvent être interprétés par le même comédien)
Texte intégral à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

Argument

Alain et Francine, un jeune couple, ont absolument besoin de dix mille francs pour rembourser Ronchaud, un ami du père d’Alain. Mais tout le monde a les pieds nickelés dès qu’il s’agit de prêter la forte somme. Mis par hasard en possession de l’argent, Alain a lui-même les pieds nickelés quand Ronchaud revient chercher son dû…

Extrait

Alain. – Es-tu sûre qu’il ait gagné six cent mille francs ? Les gens d’affaires font entre eux des affaires extraordinaires. Ils achètent très cher des choses – qu’ils ne paient pas, et les revendent encore plus cher à des gens qui ne les paient pas. Ils doivent toucher des fortunes, ils y comptent, et cette ferme espérance les soutient.
Francine. – Mais de quoi vivent-ils tous ? Qui paie leur loyer et leurs voitures ?
Alain. – De soi-disant petites commissions, dont quelques bonnes poires de province ou quelques fils de famille alimentent le marché. Ils vivent richement, au jour le jour, et quand leur vaisselle plate n’est pas au clou, ils y mangent leur vache enragée.
Francine. – Et voici comment se résume notre situation : les gens qui voudraient bien obliger n’ont pas d’argent ; quant à ceux qui ont de l’argent…
Alain. – Ils ne marchent pas. Ils ont, comme on dit, les pieds nickelés. Ils sont lourds à remuer, ainsi que des tirelires pleines. Leurs pieds nickelés ne sont que de vains ornements.

La création en 1895

La première pièce de Tristan Bernard est créée au Théâtre de l’Œuvre, dirigée par Lugné-Poë, qui jouera dans la pièce avec sa femme Suzanne Després. On soulignera l’extrême variété du programme proposé par le Théâtre de l’Œuvre le 15 mars 1895 puisque les Pieds Nickelés côtoient la pièce symboliste Intérieur de Maurice Maeterlinck. Le programme est dessiné par Maurice Denis.

 

https://www.vangoghmuseum.nl/en/prints/collection/p1350V2000
Lithographie dessinée par Maurice Denis pour le programme de l’Œuvre du 15 mars 1895. (La scène d’André Lebey, La vérité dans le vin de Charles Collé, Les pieds nickelés de Tristan Bernard et Intérieur de Maurice Maeterlinck). Source : Musée Van Gogh Museum Amsterdam (Vincent van Gogh Foundation)

 

Illustration de la première édition par Toulouse-Lautrec

http://bibliotheque-numerique.inha.fr/idurl/1/13119
Lithographie pour l’édition Ollendorff de 1895.Source : Bibliothèque numérique de l’INHA – Collections Jacques Doucet

L’expression « les pieds nickelés »

L’expression signifie à la fin du XIXème siècle « être de mauvaise volonté ». On la trouve fréquemment dans la presse de l’époque. L’origine de cette expression est confuse. Elle fait référence soit aux « pieds en nickel », trop précieux pour servir à marcher ou travailler, soit aux « pieds niclés », pieds atteints de rachitisme, noués, mal formés, ne permettant donc pas un travail soutenu.

Après la pièce de Tristan Bernard, Louis Forton a créé sous ce nom trois héros de bandes dessinées dans l’hebdomadaire l’Épatant en 1908. Louis Forton a continué à dessiner les Pieds nickelés jusqu’à sa mort en 1934, date après laquelle la série sera continuée par Aristide Perré puis Albert Badert. Il faudra néanmoins attendre sa reprise par Pellos de 1948 à 1981 pour que les Pieds nickelés renouent avec le succès. Ce sont de petits filous sans envergure illustrés d’abord par leurs coups tournent souvent mal et les entraînent fréquemment en prison, d’où le sens actuel d’archétype du malfaiteur médiocre.


Lien vers le théâtre de Tristan Bernard sur Libre Théâtre
Lien vers la biographie de Tristan Bernard sur Libre Théâtre

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