Le droit aux étrennes de Georges Courteline
Pièce courte en cinq scènes, mélangeant prose et vers, représentée pour la première fois le 16 mai 1896 au Grand Guignol.
Distribution : 4 hommes, 1 femme.
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Argument
Le 1er janvier, un bourgeois nommé Landhouille établit la liste des étrennes qu’il a reçu (aucune) et celles qu’il a donné à quantité de fâcheux et de casse-pieds. Alors qu’il est au milieu de cet inventaire à la Prévert, d’autres importuns viennent avec insolence réclamer leur part : un cocher de l' »Urbaine »qui l’a renversé lors d’une course en fiacre, un soldat qui se révèle l’amant de sa cuisinière, Louison, son ancienne maîtresse, accompagnée « d’un monsieur bien mis ».
Un extrait
Le soldat, souriant.
Je suis le bon ami de votre cuisinière.
C’est moi qui l’aide à laisser brûler le rôti,
En lui faisant l’amour quand vous êtes sorti.
Oui, bien des fois je mis à profit votre absence
Pour cueillir les trésors de sa magnificence
Et remplir, sur l’azur de votre couvre-pied,
Mes devoirs de vaillant et de galant troupier.
Je l’aide également à casser la vaisselle,
A cracher dans la sauce ou dans le vermicelle,
A très bien démantibuler les robinets
De la fontaine, et le machin des cabinets.
J’ajoute que je suis apte à vider les litres,
Que je sais prolonger les fêlures des vitres,
Et, sur l’or des parquets nouvellement frottés,
Faire grincer les clous de mes souliers crottés.
De mes talents, tel est l’énuméré rapide.
Landhouille.
Je ne sais pas à quoi ça tient, je ne saisis pas très clairement le but de votre démarche.
Le soldat.
Je m’explique. Certain d’avoir été stupide
Avec ampleur, et fourbe avec tranquillité,
D’avoir enfreint les lois de la pudicité
Et consterné les plus grands ivrognes de France
Du spectacle émouvant de mon intempérance,
D’avoir enfin, – de quoi j’atteste ici les dieux ! –
Tout fait au monde afin de me rendre odieux,
Je viens, avec la paix des consciences sereines,
Solliciter de vous mes petites étrennes.