L’avocat pédicure d’Eugène Labiche

Comédie-vaudeville en un acte d’Eugène Labiche, Gustave Albitte et Auguste Lefranc. Représentée pour la première fois à Paris au Théâtre du Palais-Royal le 24 avril 1847.
Distribution : 5 hommes, 1 femme.
Texte intégral en téléchargement gratuit sur Libre Théâtre.

L’argument

Pour échapper à ses créanciers, Philoctète, un pédicure, se réfugie chez son amie Mariette, au service de l’avocat Barbenchon. Philoctète endosse la robe de Barbenchon et se fait passer pour l’avocat. Il va devoir régler l’affaire Rambour…

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b6400860p
Labiche, Luguet, Ravel et Lhéritier : portrait par Lhéritier 1867. Source : Bnf/Gallica. A la création Luguet joue Philoctète et Lhéritier Chaffaroux.

Un extrait

Alfred, sortant du cabinet gauche.
Cet avocat se fait bien attendre !

Rambour.
Tiens ! c’est toi, Alfred !…

Alfred.
Mon oncle…

Rambour.
Ah! au fait, je devais m’attendre… Tu viens pour ton père… Tu viens m’accabler, me cribler !… tu es un ennemi.

Alfred.
Ah ! pouvez-vous croire… quand tous mes efforts ont tendu au contraire à amener une réconciliation…

Rambour.
Une réconciliation, moi, avec un têtu, un enragé… qui a osé m’envoyer du papier timbré, à moi, son frère… Ah ! parce qu’il est l’aîné, il veut me traiter en petit garçon, en Télémaque !… eh bien ! non… Télémaque se rebiffe… cette somme qu’il me dispute, je veux l’avoir seul, tout seul… Le cousin Sirop est mort… j’hérite du cousin Sirop… je ne sors pas de là !

Alfred.
Maudit cousin !… il avait bien besoin de mourir, celui-là !… qu’est-ce qui l’en priait ?… Nous étions si tranquilles, si unis… Et c’est juste au moment où j’allais épouser votre fille Eugénie, où tout était arrangé, convenu, qu’il s’avise…

Rambour.
Sirop a des torts, j’en conviens… il aurait pu attendre une meilleure occasion… car tu m’allais, toi, pour gendre… Oui, tu es un bon garçon, plein de cœur, de générosité… et ton seul défaut est d’avoir pour père ton père… Mais tu comprends que là où en sont les choses, Etéocle ne peut pas donner sa fille au fils de Polynice… ainsi…

Alfred.
Mais, mon oncle, vous voulez donc me réduire au désespoir…

Rambour.
Bah ! à ton âge, il est si facile de se distraire, de se consoler… d’ailleurs, tu aurais tort de t’entêter dans cette idée-là… car, s’il faut te le dire… eh bien ! ma fille… ma fille est déjà promise à un autre !

Alfred.
Un autre!…

Rambour.
Oui… mon ami Bourdillat m’a parlé d’un jeune homme… je ne le connais pas… mais… au fait je ne vois pas pourquoi je te cacherais… eh parbleu ! tiens, nous sommes chez lui.

Alfred.
Comment! M. Barbenchon!

Rambour.
Précisément… un avocat dans une famille, ça fait bien… quand on a des procès avec ses parents… qu’on veut faire condamner un ami…

Alfred.
Et vous croyez qu’Eugénie consentira…

Rambour.
Mais certainement… je l’y amènerai…

Alfred, à part.
Oh ! il faut absolument que je la voie…

Rambour.
Ah çà ! j’ai encore quelques notes à rédiger… (A Mariette qui rentre par la gauche avec une robe d’avocat sur le bras.) Où pourrais-je, mademoiselle, trouver ce qu’il me faut pour écrire ?


Marietteindiquant le cabinet à gauche.
Là, monsieur, dans ce cabinet.

Rambour.
Merci… au revoir, Alfred, sans rancune…

Alfred.
Parbleu!… (A part.) Oh! je reviendrai, j’aurai une explication avec cet avocat !

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