Embrassons-nous, Folleville ! d’Eugène Labiche
Comédie-vaudeville d’Eugène Labiche et Auguste Lefranc, représentée pour la première fois à Paris au théâtre du Palais-Royal le 6 mars 1850. Elle fut adaptée en opérette sur une musique de Valenti en 1879.
Texte intégral de la pièce en téléchargement gratuit sur Libre Théâtre
L’argument
Dans cette courte pièce en un acte, Labiche se moque de l’institution du mariage. Un père, Manicamp, déborde d’affection pour un ami, Folleville, qui l’a sauvé d’une situation où il risquait le déshonneur. Manicamp veut sans cesse embrasser son ami et souhaite, pour le remercier, le marier à sa fille, Berthe. Le futur gendre, bien que n’éprouvant aucun sentiment pour Berthe, n’ose contrecarrer ces projets. De son côté, la jeune fille ne l’aime pas non plus et a d’autres projets.
Les malentendus s’enchaînent, les portes claquent, de multiples vases de porcelaine sont brisés, les injures sont échangées très poliment dans ce vaudeville très alerte.
La presse lors de la création de la pièce
Anecdote rapporté dans le Journal La Sylphide du 20 mars 1850. Source : BnF/ Gallica
« Tout le monde s’embrasse sur la scène, et pour compléter le tableau, Sainville-Manicamp s’avance vers la rampe, et de sa voix la plus douce, il annonce au public, dans un couplet final, qu’il éprouve le besoin d’embrasser chaque spectateur. En effet, après la pièce, Sainville, placé au comptoir des contrôleurs, embrassa, chaque personne qui descendait… Ce détail nous a été garanti par le préposé au bureau des cannes. »
Une expression qui est restée
L’expression « Embrassons-nous Folleville » est entrée dans le langage courant dès la deuxième partie du XIXème siècle, expression ironique désignant des démonstrations d’amitié ou de joie factices, destinées à occulter des différends.
Un extrait
Manicamp, dans la coulisse.
Où est-il ? où est-il ? (Paraissant.) Ah ! vous voilà ! mon cher Folleville !… mon bon Folleville !
Folleville, à part.
Voilà que ça commence.
Manicamp.
Embrassons-nous, Folleville !
Folleville.
Avec plaisir, Manicamp.
Ils s’embrassent.
Manicamp.
Ne m’appelez pas Manicamp… ça me désoblige… appelez-moi beau-père…
Folleville.
C’est que je suis venu pour causer avec vous… sérieusement.
Manicamp.
Parlez… je vous écoute… mon gendre…
Folleville, à part, mécontent.
Son gendre ! (Haut.) Croyez, marquis, que c’est après avoir mûrement réfléchi…
Manicamp, avec attendrissement.
Ce bon Folleville !… ce cher Folleville ! Embrassons-nous, Folleville !
Folleville, s’y prêtant froidement.
Avec plaisir, Manicamp. (Ils s’embrassent. Reprenant.) Croyez, marquis, que c’est après avoir mûrement réfléchi…