Villiers de l’Isle-Adam Auguste de

Oeuvres théâtrales de Villiers de l’Isle-Adam

Le Théâtre de Villiers de l’Isle-Adam

Biographie

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b53065703s/f1.item
Atelier Nadar. Source : Gallica

Auguste Villiers de l’Isle-Adam naît à Saint-Brieuc en 1838 dans une famille de la noblesse française bretonne. Noble mais pauvre, Villiers de l’Isle-Adam étudie dans divers collèges de Bretagne et se passionne pour le piano et la poésie. En 1855, il suit ses parents qui s’installent à Paris et fréquente les cafés d’artistes. Il rencontre notamment Catulle Mendes, Charles Baudelaire et Leconte de Lisle.

Il commence une carrière de journaliste, publie des recueils de poésies, puis un roman (Isis), sans rencontrer le succès. Il s’essaie ensuite au théâtre mais les pièces Ellen en 1865 et Morgane en 1866 sont refusées. Il retourne à la poésie. En 1867, Villiers devient rédacteur en chef de la Revue des Lettres et des Arts et fréquente Mallarmé, Verlaine et les Frères Goncourt. En 1869, il écrit son premier conte cruel, intitulé L’Intersigne, et un court roman Claire Lenoir. En janvier 1870, Alexandre Dumas fils parvient à faire accepter sa pièce La Révolte au Vaudeville, mais elle n’est représentée que 5 fois. Il n’arrive pas à faire jouer ses nouvelles pièces, L’évasion et Axel. En 1883, paraît son premier recueil Contes cruels chez Calmann-Levy, et c’est le succès tant attendu. Une amitié forte le lie à Mallarmé et Huysmans. Les principales revues lui ouvrent leurs pages : Le Gil Blas, La Vie moderne, La Jeune France.Villiers de l’Isle-Adam publie en 1886 L’Eve future, roman où se mêlent science-fiction et surnaturel. En 1887, Villiers publie Tribulat Bonhomet, un recueil de contes, suivi de deux autres, en 1888, Histoires insolites et Nouveaux Contes cruels. Au cours de l’hiver 1888, il est atteint d’un cancer et meurt dans le dénuement le plus total le 18 août 1889.

Les œuvres théâtrales

Une œuvre théâtrale entre romantique et symbolisme, du drame historique au drame moderne.
Morgane, écrite en 1860, publiée en mars 1886. Drame en 5 actes. Texte intégral sur Gallica
Elën, 1865. Drame en trois actes. Texte intégral sur Gallica
La Révolte, drame en un acte publié créé le 6 mai 1870 au Théâtre du Vaudeville et publié en 1870. Texte intégral et chronique sur Libre Théâtre
Le Nouveau Monde, 1875. Drame en cinq actes. Texte intégral sur Gallica
Axël, 1890. Texte intégral sur Gallica
L’Évasion, 1887. Drame en un acte représenté pour la première fois au Théâtre-Libre sur la scène du Passage de l’Élysée des Beaux Arts le 12 octobre 1887 et repris par le même théâtre à la Porte-Saint-Martin le 25 janvier 1891. Texte intégral sur Gallica
Le Prétendant (version définitive de Morgane), écrit en 1874, publication posthume. Drame en cinq actes, représentée pour la première fois en 1965. Texte intégral sur Gallica

 

Villiers de l’Isle-Adam vu par Paul Verlaine

(Publié dans les Hommes d’aujourd’hui, n°258, 5ème volume, vers 1880)

Le comte Philippe-Auguste-Mathias de Villiers de l’Isle-Adam, poète français, né à Saint-Brieuc, le 7 novembre 1840, descend d’une des plus hautes maisons de France et d’Europe.

Il débuta presque enfant dans les lettres par un volume de vers édité chez Perrin, de Lyon, et introuvable. Ce livre contenait un grand nombre de morceaux des plus remarquables dont il me serait agréable de pouvoir citer quelques-uns si l’espace ne m’était trop mesuré. C’est modestement et orgueilleusement intitulé Premières Poésies. Espérons bien que l’auteur reprendra, dans le recueil de ses œuvres complètes, ce merveilleux péché de jeunesse.

La prose — mais une prose aussi belle que les plus beaux vers — appela de bonne heure Villiers de l’Isle-Adam (c’est ainsi que ses amis le nomment le plus communément, et ses intimes le nomment Villiers tout court ; dans sa famille, on lui dit et on dit de lui Mathias). En 1865, très jeune encore, il fit Elën, un drame d’amour exquis et sombre dont il faudrait citer le magnifique rêve d’opium. Le lecteur, après avoir pris connaissance de ce fragment, pourrait comprendre à quel écrivain de race et de taille l’on a affaire quand on visite ce poète absolu. Car poète, bien qu’ayant écrit relativement peu de vers, il l’est plus certainement qu’aucun de cette époque-ci, ou tout au moins autant que les plus vraiment poètes du siècle. Du poète il a la sensibilité, la vibration, l’éclair, il en a aussi la langue au suprême degré, sonore et riche et disant magnifiquement tout ce qu’il a fallu dire et rien d’autre, puisque du poète il possède encore le bon sens, ce don suprême du poète, le bon sens, le vrai ! le tact, la mesure (dans les deux sens qui n’en font qu’un). Mais voici non hélas ! le chef-d’œuvre tout entier, qui ne compte pas moins de trois pages de fin texte, du moins quelques lignes détachables sans trop de vandalisme :

« Je sais, chantait Maria, pendant que la barque glissait ténébreusement, je sais un Esprit fatigué d’élévations stériles et d’espoirs fondés sur les Ténèbres. Longtemps son vol puissant fut l’honneur des cieux ; dans ses regards dormaient les rêves éternels ; les soirs l’adoraient comme leur hôte et leur génie ; les couchants, lorsqu’il s’exaltait au sein de leurs profondeurs hantées par les mânes des dieux : empourpraient le glorieux veilleur de flammes et de merveilles ; — il s’attarda, par une soirée d’orgueil, d’amour et de triomphe, et la nuit foudroya ce mage de l’Ether.

« Maintenant les cieux l’ont oublié ; sa vie ne peut plus en explorer les parages ennemis ; il est tombé à travers ses espérances perdues ; il ira s’ensevelir dans la dureté de son adieu. »

Ce drame d’Elën contient une scène des plus hardies : Un jeune étudiant s’est endormi sur un banc de mousse d’une charmille d’auberge ; Elën survient et le voit, puis le contemple ; il lui est tout à fait inconnu. Un caprice la prend et, dans un monologue étincelant où se trouvent des choses comme celles-ci : « S’il savait que j’étais là ?.., Hélas ! pauvre femme charmante ; il m’a vue sans doute, et me voir c’est me connaître pour ces enfants… Peut-être il ne me connaît pas, je suis folle… », elle résout d’avoir ce jeune homme pendant trois jours, sans lui dire son nom, et de s’en aller après, « pour, dit-elle, rester pure et respectée dans l’âme de quelqu’un sur la terre », et elle l’éveille d’un baiser sur le front.

SAMUEL.
Hein ? qu’est-ce ? (Après un profond silence.)
Oh ! comme vous êtes belle !
ELEN.
Voulez-vous venir avec moi, monsieur ?
SAMUEL (debout, ébloui).
Comme vous êtes belle !
ELEN (l’entraînant par les deux mains).
Venez, venez ! (Ils traversent la charmille ensemble.)
(Le rideau tombe.)


N’est-ce pas que c’est un peu le Passant ? avec, disons-le à la louange de Coppée et de Villiers (le signataire de ceci a l’honneur de compter parmi les intimes de notre poète) des différences du tout au tout. Ici le « passant » est un jeune homme fait moitié philosophe et moite rêveur, dont l’amour va mettre la philosophie à l’envers et cuber la rêverie, et cette Elën de malheur est une tout autre gaillarde que la bonne Sylvia. Zanetto paraît bien, dans le drame de Villiers, sous le nom de Matuccio, chanteur et page d’Elën, dix-sept ans, précise le personnœ dramatis ; mais attendez :

Distingué par Elën d’un coup de pistolet d’entre une bande de brigands italiens dont il faisait partie à l’âge heureux de quinze ans, puis soigné chez elle et vu, qu’il était spirituel et joli comme un démon, promu son page, il a bien quelque idée pour sa maîtresse : « Ô trop dédaigneuse Elën ! » se dit-il dans la scène I ; mais il préfère à tout les pays de soleil, de paresse et d’amourettes, et l’or qui lui procurera tout cela. Aussi se fait-il allègrement le complice de la jalouse et très riche Mme de Valburg et empoisonne, non sans grâce et par des fleurs, la belle créature qui meurt au milieu d’une fête, dans son palais resplendissant de lumières, de toilettes, d’yeux joyeux et de sourires. Aux funérailles d’Elën, Samuel, l’étudiant endormi du premier acte, tout d’un coup édifié sur le passé de celle-ci, jette cruellement sur son cercueil, pour la payer des trois dernières nuits, une bourse pleine d’or, de billets et de diamants, toute sa fortune, qui est immense, réalisée de la veille, en vue de fuir et de vivre avec la courtisane, qu’il avait crue pure jusque-là et toute à lui. De cette bourse miraculeuse le rusé page s’empare et s’esquive en criant : Tout est bien qui finit bien !

L’auteur a choyé, gâté ce personnage pourtant épisodique et de pure utilité, et qui ne dit pas un mot qui ne soit terriblement portant et toujours exquisite, comme dit intraduisiblement l’Anglais, brillant comme l’acier, sinistre comme le crime. Sans compter que, ô les ravissants travestis ! dans cette pièce moderne (l’action se passe en 18… probablement après Leipzig ou Waterloo, à en juger par une allusion de Samuel à des « batailles pour la patrie ») il arbore des costumes aussi éclatants que variés, soie cramoisie, satin blanc, perles, poignards à gaine d’or. La splendide petite canaille toutefois n’empiète pas sur les quatre principales figures, Elën, la Valburg, Andréas et Samuel, figures très bien campées et véritablement magistrales de vie intense et de langage essentiellement approprié dans sa superbe grandiloquence. En somme Elën est un magnifique drame écrit et composé par un maître et dont la représentation serait bien à désirer pour l’honneur obscurci de la scène française.

Parallèlement à Elën, Villiers publiait Isis, un roman, ou plutôt la première partie d’un roman philosophique, dont il est douloureusement regrettable que la suite n’ait pas paru. Tel qu’il est, ce fragment considérable suffirait à classer l’auteur parmi les premiers de nos prosateurs, et moi j’ose ajouter qu’il est un de ses nombreux titres à se voir sortir du rang par l’avenir et proclamé le plus grand.

La philosophie qui ressort de cette œuvre et de toutes les œuvres de Villiers, je soutiendrai à qui voudra et je prouverai qu’elle mérite toute attention, tout respect, et je ne tiens pas pour sûr qu’elle ne soit pas un jour la formule du siècle.

Morgane, un drame plus beau peut-être encore qu’Elën, profond et noir, avec des splendeurs, suivit de près la publication d’Isis. La cour de la Naples de Nelson et de Caroline y déploie ses intrigues sanglantes, ses terribles passions, son luxe et son mystère. La charmante et perverse figure d’Emma Lyonna, duchesse de Hamilton, pénètre l’action d’un frisson saphique tout nouveau depuis Shakespeare au théâtre. La Révolte absurdement tombée en 1869, au Vaudeville ; le Nouveau Monde que jouèrent naguère les Nations, aux applaudissements de l’élite, deux essais miraculeux, complètent avec Axel, dont les fragments publiés pronostiquent un immense succès définitif, le théâtre de Villiers, qui a toute une série dramatique en gestation, pour notre bonheur et l’honneur éternel des Lettres.

Claire Lenoir, une longue nouvelle parue en 1869 dans la Revue des Lettres et des Arts dirigée par notre poète, est un génial mélange d’ironie, de métaphysique et de terreur. Les Contes cruels devaient de nos jours répéter cette triple note bien caractéristique du génie de Villiers, avec l’autorité d’un talent plus mûr. Les Contes cruels et la Révolte sont les seuls livres de notre auteur que puisse se procurer facilement un amateur du grand et du beau, du fin et du profond. L’unique Bibliothèque Nationale est à même de pourvoir le curieux de ses premières œuvres. L’avenir évidemment ménage au grand public une réimpression complète.

En attendant, j’ai cru bien faire d’insister surtout sur Elën et quelque peu sur les autres productions de cette période.

Lisez toujours les Contes cruels et la Révolte.

Pour en savoir plus : Villiers de l’Isle-Adam. Le théâtre et ses imaginaires, Littératures n°71, 2014. 

La Révolte d’Auguste de Villiers de l’Isle-Adam

Drame en un acte publié créé le 6 mai 1870 au Théâtre du Vaudeville et publié en 1870.
Distribution : 1 homme, 1 femme
Texte intégral de la pièce à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b84031092
La révolte, drame de Villiers de L’Isle-Adam : estampe de 1870. Source : BnF/Gallica

L’argument

Alors qu’il est presque minuit, Félix, un banquier, et sa femme Élisabeth font le point sur les comptes. La fortune de Félix a presque triplé grâce aux initiatives d’Élisabeth et elle tente de le convaincre Félix de ne pas envoyer d’assignation à de pauvres locataires incapables de payer.  Peu à peu l’attitude d’Elisabeth change : elle annonce à Félix qu’elle le quitte pour toujours. 

Cette pièce est passionnante à plus d’un titre. La critique de 1870 a été choquée par la modernité du sujet : la tentative de révolte d’une femme, intelligente et sensible, dans une société matérialiste et bourgeoise, qui la cantonne au rôle d’épouse et de mère. Le personnage d’Élisabeth se nourrit de sentiments contradictoires: elle est tour à tour soumise, ironique, lyrique, mélancolique, révoltée, désespérée. Dans l’histoire du théâtre, cette pièce marque également une rupture par son audace formelle et son style épuré.

 

Les réactions de la critique lors de la création

Face à ce drame d’un genre nouveau, certains critiques s’enthousiasmèrent ; d’autres réagirent avec violence. Villiers de l’Isle Adam revint sur ces réactions, quelques mois après la création de la pièce  dans la préface de l’édition de la Révolte. (Lien sur l’édition en ligne sur archive.org)

Voici les trois scènes, si simples, qui ont, un instant, mis quelque peu en émoi la Critique de France, et dont l’exécution au Théâtre du Vaudeville a dû être arbitrairement interdite, à la cinquième soirée, comme blessante pour la dignité et la moralité du public de la Bourse
et des boulevards.
J’eusse préféré le silence à tous ces volumineux articles qui ont jeté sur cette œuvre un semblant de célébrité. Merci, toutefois, et « du cœur de mon cœur, » comme dit Hamlet, à ces maîtres de la Pensée, de l’Art et du Style, qui l’ont si magnifiquement acclamée, expliquée ou défendue ! À Richard Wagner, à Théodore de Banville, à Théophile Gautier, à Franz Listz, à Leconte de Lisle, à Alexandre Dumas fils, sans la violente intervention duquel ce drame n’aurait même pas vu la lumière. — Merci à tous ceux qui ont écrit, au sujet de La Révolte, ces belles pages dédaigneuses que de joyeux critiques se bornaient à répéter un peu à l’instar des oiseaux (…) Et aux deux vaillants artistes qui ont imposé à toute la salle l’obsession de ces trois scènes! Et à toute cette jeunesse enthousiaste qui applaudissait et qui avait le courage de sa pensée, comme devant toute la « Bêtise au front de taureau » j’avais le courage de la mienne.
(…)
Aujourd’hui, le Théâtre aux règles posées par des hommes amusants (et qui nous encombre de sa Morale d’arrière-boutique, de ses Ficelles et de sa « Charpente » pour me servir des expressions de ses Maîtres) tombe de lui-même dans ses propres ruines, et nous n’aurons malheureusement pas grands efforts à déployer pour achever son paisible écroulement dans l’ignominie et l’oubli. On y assiste, on rit, mais on le méprise. On dit de ce qu’il enfante : « C’est un Succès !» — Le mot Gloire ne se prononce plus.
Eh bien! — et c’est pour cela que j’écris ces lignes, — puissé-je garder cette illusion légitime
de penser que La Révolte (si restreinte que soient les proportions de ce drame) est la première tentative, le premier essai, risqués sur la scène française, pour briser ces soi-disant règles déshonorantes! C’est son seul mérite à mes yeux! Et j’ai tenu à le constater, voilà tout. Encore quelques aventures comme celle-ci, et la Foule se décidera à penser par elle-même et non par deux ou trois cerveaux dont l’intelligence, stérilisée par la fonction qu’elle exerce, est devenue notoirement impropre à saisir les aspects ou les profondeurs d’une Œuvre, si celle-ci est en dehors des complications routinières où s’agite leur imagination.

Parmi les analyses intéressantes parues lors de la création, on citera l’article de Théodore de Banville, publié dans Le National le 8 mai 1870 (dans Villiers de l’Isle-Adam : biographie et bibliographie. Edouard de Rougemont. Mercure de France.1910 sur Gallica )

Elle a éclaté comme un orage furieux, cette terrible sincère et violente pièce de M. Villiers de l’Isle-Adam, la Révolte. C’est, au milieu d’une implacable et patiente analyse à la Balzac, illuminée par des éclairs du génie de Balzac, une grande imprécation tragique aux invincibles élans, qui à la fois vous subjugue l’esprit et vous prend aux entrailles. M. Villiers de l’Isle-Adam, poète et prosateur n’est pas un artiste ordinaire, il a, non pas du talent, mais cette abondance d’invention, cette hauteur de conception, cette puissance de créer, parfois égarée, hésitante, mais parfois aussi complète et sublime, qui, en tous pays constitue une portion de génie. (…)
Le sujet de la Révolte est bien simple…et bien terrible I C’est le supplice d’une femme jeune, belle, aimée, profondément honnête et vertueuse, et douée même de la science des affaires et d’un remarquable esprit pratique, unie, mariée, enchaînée à un homme qui est un formidable imbécile. Non cet imbécile appelé Jocrisse, qui du moins réjouit les yeux par le vermillon acharné de sa veste et sa queue rouge envolée, surmontée du tricorne sur lequel voltige un papillon symbolique ; mais l’imbécile riche, heureux, beau, bien fait, banquier, considéré, pas voleur, au contraire honnête par politesse, vêtu à la dernière mode, comme le dictionnaire de Bouillet, membre de tous les conseils et de toutes les commissions, beau joueur, beau cavalier, ayant de la considération en portefeuille, mais bête à manger du foin, si bien que toutes les tortures inventées par le moyen âge ne sont rien auprès de celle qui consiste à voir sans cesse ses yeux atones qui contiennent des océans d’ineptie, ses lèvres où voltige un sourire plein de solécismes. et son geste absurde ! et que la lente goutte d’eau tombant sans s’arrêter jamais sur le front du condamné enchaîné sous une roche, n’est rien auprès du lieu commun toujours prêt et toujours le plus vulgaire de tous qui, inévitablement tombe de la bouche de cet assassin. M. Tarbé,dans son article d’hier proteste sur ce point et affirme que le type n’existe pas. Certes, notre excellent confrère est personnellement assez spirituel et vit au milieu de gens assez spirituels pour avoir le droit de croire que la bêtise est absente de ce bas monde, et même que certaines âmes angéliques se refusent à croire au mal et aux méchants. Cependant les imbéciles existent ; il y en a, et c’est un fait avéré. Malheur à la femme mal mariée, enchaînée à ce rocher ridicule où elle est dévorée par une oie.

 

Pour aller plus loin 

Lydie Parisse, « La Révolte. Une écriture vers la scène. Théâtralité et métathéâtralité », Littératures [En ligne], 71 | 2014, mis en ligne le 24 avril 2015, consulté le 30 mai 2019. URL : http://journals.openedition.org/litteratures/329

Dossier de presse de la mise en scène de Charles Tordjman au Théâtre de Poche Montparnasse, 2017-2018.

 

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