La Sensitive d’Eugène Labiche et Alfred Delacour
Comédie-vaudeville en trois actes, représentée pour la première fois, à Paris, sur le théâtre du Palais-Royal, le 10 mars 1860.
Distribution : 6 hommes, 2 femmes
Texte intégral de la pièce à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre.
L’argument
Onésime Bougnol et Laure Rothanger vont se marier. Gaudin, le domestique de Bougnol, voit avec inquiétude cette alliance, qui va sans doute perturber ses habitudes. Dans une atmosphère de fête, les invités arrivent, dont deux militaires, l’ancien précepteur de Laure et les parents de la mariée. Mais Onésime est un grand sensible et ne peut accomplir ses devoirs conjugaux lors de la nuit de noces à la suite de différents incidents. Les deux militaires et l’ancien précepteur courtisent alors la jeune fille.
Un extrait et des illustrations…
Gaudin.
Ainsi, Monsieur persiste toujours à se marier malgré les rhumatismes… qu’il aura ?
Bougnol.
Toujours !
Gaudin.
Je crois que Monsieur fera bien de réfléchir !… D’abord, êtes-vous bien sûr d’être né pour le mariage ?…
Bougnol.
Comment, imbécile ?
Gaudin.
Ah ! monsieur, c’est que j’ai eu des renseignements par mademoiselle Pausanias… cette petite marchande de tabac avec laquelle vous passiez de longues heures à choisir des cigares…
Bougnol.
Eh bien ?
Gaudin.
Elle prétend que vous êtes d’un caractère inégal… qu’un rien vous trouble, vous émeut… Enfin, que vous avez des vapeurs, des absences dans la conversation…
Bougnol.
Moi ?
Gaudin.
On a bien tort de se brouiller avec ces demoiselles-là… Ça les vexe… et alors, elles jasent… elles cancanent…
Bougnol.
Je ne comprends pas !… Qu’a-t-elle pu dire ?…
Gaudin.
Il paraît qu’un jour… à sa fête… vous lui aviez composé un petit compliment ?
Bougnol.
Un quatrain… huit vers seulement…
Gaudin.
Vous vous apprêtiez à les lui débiter… lorsque tout à coup… drelin dindin !… un coup de sonnette !
Bougnol.
Très violent… je m’en souviens.
Gaudin.
Et cela a suffi pour vous faire perdre la mémoire ! Vous avez pâli, vous vous êtes troublé… et vous avez bégayé toute la soirée.
Bougnol.
C’est vrai : le moindre bruit, la moindre émotion me trouble ; ma langue s’embarrasse, et je bégaye…
Gaudin.
Ah ! vous avez là un défaut bien désagréable dans un ménage ! Voulez-vous que je vous dise, monsieur… vous êtes de la nature de la sensitive !
Bougnol.
La sensitive ?… qu’est-ce que c’est que cela ?