Le Faiseur (Mercadet) d’Honoré de Balzac

Mercadet

Comédie d’Honoré de Balzac en trois actes et en prose, écrite en 1840, créée en 1851.

La pièce Mercadet a été écrite en 1840 (sous le titre Le Faiseur), mais on ne manquera pas d’être frappé par l’étonnante résonance de ce texte illustrant les dérives de la bourgeoisie financière sous la Monarchie de Juillet : lancement de rumeurs, manipulation de l’information, spéculation, délit d’initié… Mercadet  utilise toutes ces ficelles pour duper ses créanciers et arrive à les convaincre de sa bonne fortune, même lorsqu’il se trouve au bord de la faillite. Les bons mots et les traits d’esprit rythment cette comédie économique où l’on perçoit aussi le talent de Balzac moraliste. 

Le lecteur ou le spectateur sera également surpris par le personnage de l’associé dont Mercadet ne cesse de parler et que l’on ne verra pas… Godeau ! (extrait de la scène 7 de l’acte I)


MME MERCADET
Je m’imagine toujours que Godeau peut revenir.
MERCADET
Après huit ans sans nouvelles, vous espérez encore Godeau !.. Vous me faites l’effet de ces vieux soldats qui attendent toujours Napoléon.

Godeau

Plus de cent ans avant Beckett, Balzac met en scène l’absence, qui n’est pas encore un vide existentiel, à travers le personnage de Godeau. Barthes y a consacré dans ses Essais critiques quelques pages éclairantes :

Le grand thème du Faiseur, c’est donc le vide. Ce vide est incarné : c’est Godeau, l’associé-fantôme qu’on attend toujours, qu’on ne voit jamais, et qui finit par créer la fortune à partir de son seul vide. Godeau est une invention hallucinante ; Godeau n’est pas une créature, c’est une absence, mais cette absence existe, parce que Godeau est une fonction : tout le nouveau monde est peut-être dans ce passage de l’être à l’acte, de l’objet à la fonction ; il n’est plus besoin que les choses existent, il suffit qu’elles fonctionnent ; ou plutôt, elles peuvent fonctionner sans exister. Balzac a vu la modernité qui s’annonçait, non plus comme le monde des biens et des personnes (catégories du Code napoléonien, mais comme celui des fonctions et des valeurs : ce qui existe, ce n’est plus ce qui est, c’est ce qui se tient. Dans Le Faiseur, tous les personnages sont vides (sauf les femmes), mais ils existent parce que, précisément, leur vide est contigu : ils se tiennent les uns par les autres. »

Une critique politique

Dans ce vaudeville, la critique politique n’est jamais très loin et Balzac dresse un portrait sans concession d’un arriviste :  le personnage De la Brive, une sorte de double de Mercadet, annonce ainsi son projet de devenir homme politique, après son mariage avec la fille de Mercadet. Nul doute que la lecture du passage de la scène 4 de l’acte II vous fera réagir…

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Quelques représentations remarquables

La pièce a fait l’objet d’une lecture par la Comédie-Française en 1848, sous le titre Le Faiseur.

Elle sera créée trois ans plus tard, en 1851, au Théâtre du Gymnase, sous le titre de Mercadet. La pièce est jouée pour la première fois à la Comédie Française en 1868.

En 1934, sous le titre Mercadet ou Le Faiseur, adaptée par Simone Jollivet, la pièce est montée par Charles Dullin qui joue le rôle-titre. Darius Milhaud compose la musique de scène.

Faiseur_FilmEn 1936, André Hugon réalise un film à partir de la pièce (informations complètes sur le site d’Unifrance et sur le site de Jacqueline Waechter).

En 1957, pour le TNP, Jean Vilar l’adapte, la met en scène et joue le rôle-titre (notice sur data.bnf.fr).

La pièce fait l’objet d’une adaptation pour la célèbre émission télévisée d’Au Théâtre ce soir, lors des fêtes de fin d’année en 1977
Lien vers l’adaptation sur le site de l’INA

En 2014, Emmanuel Demarcy-Mota met en scène la pièce au Théâtre de la Ville à Paris. Il en transpose l’action dans les années 1970 (Lien vers différentes émissions de France Inter où Emmanuel Demarcy-Mota évoque le texte et sa mise en scène).

"Le faiseur" de Balzac par la troupe des TrŽéteaux de France  Crédit photo : Eric Facon
« Le faiseur » de Balzac par la troupe des Tréteaux de France. Crédit photo : Eric Facon

La pièce était  à l’affiche au Théâtre de l’Épée de Bois, produite par les Tréteaux de France,  mise en scène de Robin Renucci. Lien vers la pièce à l’affiche

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