L’Île des esclaves de Marivaux

Comédie en un acte et en prose, représentée pour la première fois le lundi 5 mars 1725, à l’Hôtel de Bourgogne par les Comédiens Italiens.
Distribution : 3 femmes, 2 hommes
Texte intégral de la pièce à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argument

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1051624b
L’Île des esclaves. Source : BnF/Gallica

Deux maîtres, Iphicrate et Euphrosine échouent après un naufrage dans une île gouvernée par des esclaves fugitifs, au large d’Athènes. Les lois de cette nouvelle république imposent aux esclaves de devenir maîtres et aux maîtres de devenir esclaves dans un but de rééducation de ces derniers.
Trivelin, responsable de l’île et garant de ses lois, explique le processus de rééducation des naufragés. Les maîtres vont perdre leurs noms et leurs habits qu’ils doivent céder à leur valet et servante, Arlequin et Cléanthis.
Ils devront écouter le portrait cruel que feront d’eux leurs serviteurs et reconnaître sa véracité. Trivelin se retire.
L’épreuve des maîtres atteindra son paroxysme lorsque Arlequin et Cléanthis projettent un double mariage : le valet avec la maîtresse et la servante avec le maître.
Euphrosine bouleverse Arlequin par ses pleurs et son discours émouvant.
Les serviteurs pardonnent à leurs maîtres. Les maîtres affranchissent leurs esclaves. Trivelin réapparaît pour consacrer cette humanité retrouvée de part et d’autre.

Un extrait

Trivelin.
Ne m’interrompez point, mes enfants. Je pense donc que vous savez qui nous sommes. Quand nos pères, irrités de la cruauté de leurs maîtres, quittèrent la Grèce et vinrent s’établir ici, dans le ressentiment des outrages qu’ils avaient reçus de leurs patrons, la première loi qu’ils y firent fut d’ôter la vie à tous les maîtres que le hasard ou le naufrage conduirait dans leur île, et conséquemment de rendre la liberté à tous les esclaves : la vengeance avait dicté cette loi ; vingt ans après, la raison l’abolit, et en dicta une plus douce. Nous ne nous vengeons plus de vous, nous vous corrigeons ; ce n’est plus votre vie que nous poursuivons, c’est la barbarie de vos cœurs que nous voulons détruire ; nous vous jetons dans l’esclavage pour vous rendre sensibles aux maux qu’on y éprouve ; nous vous humilions, afin que, nous trouvant superbes, vous vous reprochiez de l’avoir été. Votre esclavage, ou plutôt votre cours d’humanité, dure trois ans, au bout desquels on vous renvoie, si vos maîtres sont contents de vos progrès ; et si vous ne devenez pas meilleurs, nous vous retenons par charité pour les nouveaux malheureux que vous iriez faire encore ailleurs, et par bonté pour vous, nous vous marions avec une de nos citoyennes. Ce sont là nos lois à cet égard ; mettez à profit leur rigueur salutaire, remerciez le sort qui vous conduit ici, il vous remet en nos mains, durs, injustes et superbes ; vous voilà en mauvais état, nous entreprenons de vous guérir ; vous êtes moins nos esclaves que nos malades, et nous ne prenons que trois ans pour vous rendre sains, c’est-à-dire humains, raisonnables et généreux pour toute votre vie.

Pour aller plus loin

Sitographie proposée par Eduscol
Option théâtre Capes Lettre , épreuve orale
Fiche pédagogique réalisée par Nathalie HAMEN à partir de la mise en scène de Jean-Thomas Bouillaguet en 2012
Dossier de presse de la Comédie-Française, mise en scène de Benjamin Jungers en 2014.

Mise en scène de Jean-Luc Lagarce en 1994 : lien vers le site consacré à Jean-Luc Lagarce
« Le monde n’existe pas, il est ce que nous sommes, il est ce que nous voulons qu’il soit, nous le construirons bon et généreux ou dur et tyrannique. Nous sommes responsables de notre rôle, il suffit de prendre sa place. La mise en scène de notre théâtre, nous en sommes responsables. »

Comédie Française le 5 juillet 1939

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b10507389x/f11

Article de Pierre Dux, le metteur en scène, à l’occasion de l’entrée du texte dans le Répertoire de la Comédie-Française. Source : BnF/Gallica

Print Friendly, PDF & Email
Retour en haut