Hortense, couche-toi ! de Georges Courteline

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5544937p
Les marionnettes de la vie / Georges Courteline ; illustrations de A. Barrère. Edition Flammation 1900. Source : BnF/ Gallica

Pièce en trois scènes avec 2 hommes, 1 femme et des déménageurs (choeur).
Pièce créé au Grand Guignol le 15 mars 1897 avec Albert Mayer dans le rôle de La Brige, R. Lagrange dans le rôle de Saumâtre et Lola Noyr dans le rôle d’Hortense. La pièce paraît en 1900 dans la première édition collective du Théâtre de Courteline sous le titre Les Marionnettes de la vie (1 volume, Flammarion).
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Argument

Un propriétaire impitoyable, Monsieur Saumâtre, s’apprête à faire saisir les meubles du locataire, La Brige, qui a commencé à déménager alors qu’il lui reste un loyer à acquitter ; La Brige a en effet dû consacrer l’argent du loyer à des frais médicaux pour sa femme, enceinte de neuf mois. Il propose au propriétaire différentes solutions, en vain. La Brige alors ne se laisse pas faire :  il refuse de payer et de quitter les lieux, la loi accordant à sa femme neuf jours pour accoucher et la situation de retourne…

Un extrait

MONSIEUR SAUMÂTRE.
D’où je conclus qu’étant donné une maison dont je suis seul propriétaire, tout le monde y est maître, excepté moi?…
LA BRIGE.
Naturellement.
MONSIEUR SAUMÂTRE.
Dans tous les cas, il est tout à fait inutile d’élever la voix comme vous le faites. Discutons et tombons d’accord. Nous ne sommes des bêtes féroces ni vous ni moi. Voyons… vous me laisseriez, vous dites ?
LA BRIGE.
Je vous laisserai peau de balle.
MONSIEUR SAUMÂTRE.
Comment ?
LA BRIGE.
Et balai de crin… J’emporterai jusqu’aux verres de lampes.
MONSIEUR SAUMÂTRE.
Tout à l’heure…
LA BRIGE.
Tout à l’heure n’est pas à présent… Il fallait accepter quand je vous ai offert.
MONSIEUR SAUMÂTRE.
J’ai changé d’avis.
LA BRIGE.
Moi aussi.
MONSIEUR SAUMÂTRE.
Soit, je ne veux pas de discussion avec un bon locataire. Vous me signeriez donc des billets payables à quarante-huit heures?
LA BRIGE.
Je vous signerai peau de zébie.
MONSIEUR SAUMÂTRE.
Elle est trop forte ! Pourquoi me l’avez-vous offert, puisque vous aviez l’intention de revenir sur votre parole ?…
LA BRIGE.
Pourquoi avez-vous refusé, puisque vous deviez revenir sur votre décision ?
MONSIEUR SAUMÂTRE.
Permettez !
LA BRIGE.
Permettez vous-même. J’étais, il y a un instant, un pauvre diable au désespoir de ne pouvoir payer ses dettes et qui en appelait humblement au bon vouloir de son semblable. La loi me menaçait donc de ses foudres. A cette heure, passé à d’autres exercices, je vous expulse d’une maison qui a cessé d’être la mienne. J’ai donc la loi avec moi. Car c’est aussi simple que cela, et il suffit neuf fois sur dix à un honnête homme échoué dans les toiles d’araignée du Code de se conduire comme un malfaiteur, pour être immédiatement dans la légalité. Eh bien, monsieur, j’y suis, j’y reste. Vous m’avez contraint à m’y mettre, vous trouverez bon que j’y demeure. Sur ce, mon cher propriétaire, faites-moi le plaisir de filer, que j’aille chercher la sage-femme. – Eh bien, Hortense ?… Au lit !… Couche-toi !
MONSIEUR SAUMÂTRE.
Hortense, ne vous couchez pas ! (A La Brige.) Fichez-moi le camp, vous, elle, votre bronze de chez Barbedienne, votre buffet et votre baromètre ! Débarrassez-moi le plancher et que je n’entende plus parler de vous.

La salle du Grand Guignol

La pièce a été créée au Grand Guignol, l’année de l’ouverture de cette salle. D’une capacité de 280 places, le théâtre était situé 7, cité Chaptal, dans le 9e arrondissement. Sa programmation spécifique alternait des drames macabres et sanguinolentes et des saynètes comiques.

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b9005896h
Théatre du Grand Guignol de Paris. L’homme qui a tué la mort, drame en 2 actes de M René Berton – mise en scène de C. Choisy… : [affiche] / A. Barrère 1928. Source : BnF/ Gallica
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