La Bigote de Jules Renard

Comédie en deux actes, représentée pour la première fois le 21 octobre 1909 sur la scène du Théâtre de l’Odéon.
Distribution : 5 hommes et 6 femmes
Texte à intégral de la pièce à télécharger gratuitement sur Libre Théâtre

L’argument

http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b531299620/f1.item
Léon Bernard dans « La bigote » de Jules Renard / dessin de Yves Marevéry. 1909. Source : BnF/Gallica

M. Lepic, maire d’une petite commune du Nivernais est un libre-penseur alors que sa femme est bigote. Lorsque Paul Roland vient demander la main de leur fille, M. Lepic le met en garde contre l’influence nocive des curés dans la vie des couples.

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Extrait de l’article de G de Pawlowski,  journal Comœdia illustré. 11 novembre 1909.   Source: BnF/Gallica

« Ce sont deux actes qui mettent en scène quelques épisodes de la vie de cette famille Lepic, que les chefs d’œuvre de M. Jules Renard ont rendue populaire dans le monde des lettres.

Il s’agit de nous montrer comment l’intervention du curé dans une famille provinciale honnête, peut aboutir à un véritable ménage à trois.
Le premier acte expose quels sont, dans la vie courante de la famille, les résultats d’une pareille intervention.
Le second acte est consacré à une exposition de principes plus directe, et se termine d’une façon décourageante par la mainmise d’un curé sur les générations nouvelles que l’on espérait voir échapper à son action.
Au premier acte, la famille Lepic, dans un intérieur bourgeois que vous devinez, est à table. M. Lepic, déjà vieux, a renoncé à la lutte ; définitivement, il s’est renfermé dans sa coquille, passe ses journées à la chasse, fume sa pipe et ne répond plus rien lorsqu’on lui adresse la parole. Ce silence obstiné d’un brave homme épouvante tout le monde ; on craint M. Lepic car on ne discerne même plus quelles peuvent être les causes véritables de l’éternelle bouderie de ce bourru bienfaisant.
Mme Lepic est une bigote, c’est-à-dire que le côté extérieur seul de la religion l’intéresse. Ce n’est point une mystique, car elle garde le paradis pour elle toute seule et ne cherche point à convertir son entourage. Elle trouve toute sa force dans l’appui moral que lui prête le curé ; elle garde égoïstement cet appui pour elle toute seule : le curé n’est pour elle qu’une belle relation céleste.
Le respect de Mme Lepic pour le curé n’est en somme que la manifestation la plus vive du respect qu’elle a pour toutes les traditions sociales. Cela, est si vrai que Mme Lepic, en toute circonstance, tient à sauvegarder la dignité extérieure de son ménage et ne tarit point en éloges sur son mari. Elle dissimule ses gronderies, transforme ses violences continuelles en attentions charmantes ; Mme Lepic est une provinciale dans toute la force du terme.
M. Lepic a un allié : c’est son fils, qui vient de passer son baccalauréat. Son intelligence ne nous apparaît pas clairement, mais surtout son désir d’être avec son papa, d’aller à la chasse plutôt qu’à l’église, et de fumer la pipe parce que l’on aime bien prendre des allures d’homme alors qu’on n’est encore qu’un enfant. Son indépendance n’est qu’une dépendance déguisée.
Mme Lepic a pour alliée passive sa fille Henriette, qui souffre en silence de la mésintelligence familiale, redoute son père, le plaint parfois sans oser le lui dire, et qui, en qualité de fille bien élevée, ne peut faire cependant que ce que sa mère lui dit de faire. C’est un caractère faible que l’éducation traditionnelle n’a fait qu’assouplir encore et qu’aucune initiative ne saurait libérer.
Cette fille Henriette, il s’agit de la marier à tout prix, et c’est aujourd’hui que doit venir un nouveau prétendant, le jeune Paul Roland. L’anxiété est grande. Déjà, M. Lepic, à la suite d’un entretien mystérieux, a mis en fuite un premier candidat. Que se passera-t-il aujourd’hui !
Une amie d’Henriette, plus confiante et aussi plus émancipée, interrogera hardiment M. Lepic qui, contrairement à la crainte générale, ne paraîtra point s’opposer au mariage.
Mme Bache, la mère du fiancé, qu’épouvante aussi M. Lepic, n’osera point lui faire sa demande, et c’est M. Paul Roland lui-même qui, au second acte, devra aborder le terrible maire anticlérical pour lui demander la main de sa fille. C’est une occasion pour M. Lepic d’exposer quel fut le désastre de sa vie et de mettre le jeune homme en garde contre les manœuvres du curé.
M. Lepic, lorsqu’il s’est marié, aimait sa femme. Il a tout fait pour la conserver ; le curé la lui a prise. Que Paul Roland fasse bien attention : la fille de Mme Lepic a été élevée par sa mère, elle lui ressemble. Que Paul Roland ne recommence point la triste aventure de M. Lepic !
M. Paul Roland est un brave jeune homme : il ne craint rien ; Henriette l’aime, et puis c’est un esprit libre, il est au-dessus de tous les vieux préjugés. M. Lepic lui accorde la main de sa fille et part pour la chasse. Et, dès qu’il est sorti, le curé s’assied dans son fauteuil. Entouré par toute la famille triomphante, il bénit les nouveaux fiancés.
Paul Roland a l’esprit trop libre pour ne point lui faire bon accueil dès le premier jour. Nous sentons que le curé prendra dans le nouveau ménage la même place qu’il occupe dans l’ancien. L’Eglise est patiente parce qu’elle est éternelle, et son histoire est un perpétuel recommencement. »





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